Ari Aster est un réalisateur qui m'intéresse fortement, de par sa lecture du genre et de par son approche si particulière, on ne peut qu'être tenté par son cinéma. "Beau Is Afraid" est donc sa nouvelle réalisation, et malheureusement, bien que je l'attendais, j'ai été un peu déçu par celle-ci. Malgré tout, j'aimerais relativiser certaines choses et je vais commencer par ce que le film essaye de proposer. Clairement, le long-métrage est très dense, il se construit dans un ensemble mélangeant l'absurde et les thématiques en sous-texte de manière assez clair. C'est donc assez compliqué de vraiment ressortir du visionnage avec toutes les clés pour comprendre cette œuvre, je pense qu'il y a beaucoup de choses intéressantes que l'on ne peut pas voir au moment de notre première fois face au film. Et c'est exactement ce qu'Ari Aster a tenté de proposer, à savoir un film riche et qui peut parfois perdre son spectateur. Mais son idée reste la même durant toute l'œuvre, le réalisateur a envie de nous plonger au sein des pensées et de la vie de notre personnage principal. Dès la scène d'introduction, la notion de subjectivité avec lui est très affirmée, et cela se confirme par la suite. Beau est un héros qui, en plus d'être parfaitement interprété par Joaquin Phoenix, développe la thématique de la peur. Il est toujours tétanisé par ce qu'il vit, et cette peur le rendra comme un acteur presque secondaire du récit. Il subira tout ce qui se produira, même si les conséquences de tout cela viennent principalement de sa peur. Le film va traiter cela de manière assez élargie avec un gros rapport aux traumatismes d'enfance, à notre rapport parental, etc... En ce sens, le personnage de Beau est donc intéressant, car il reflète des choses assez évidentes et bien mises en situation par le film. C'est là que vient le deuxième gros parti-pris du projet, à savoir son style très particulier. Nous sommes face à un univers où l'absurde domine, avec un ton qui va donc varier de l'humour pour aller vers certains passages plus poétiques, tout en passant par l'horrifique. Le tout est donc assez large, et honnêtement, pendant la première partie du film, j'ai aimé certaines de ces propositions. Je me suis retrouvé à rire assez franchement face à ces situations, le long-métrage allant vraiment loin dans son délire. Cela se caractérise jusqu'au milieu du projet à mon sens, avec une séquence absolument dingue en matière de mise en scène et d'idées visuelles, où l'animation vient épouser le réel. C'est donc réellement secouant de vivre cette expérience et je pense qu'il y avait vraiment moyen de rendre l'ensemble très réussi. Malheureusement, et cela m'embête de noter ce point, mais il faut bien le faire, je trouve que le film est beaucoup trop long. 3 heures de ce genre de délire, peut-être que certains trouveront que c'est juste parce que je suis un idiot qui n'arrive pas à rester en place, mais je trouve que c'est beaucoup trop dense. Ce type de durée ne s'adapte pas à ce genre de proposition, car on a beau me raconter ce que l'on veut, au bout d'un moment, il est très facile de descendre du train. Le rythme est tellement découpé d'une manière assez particulière, qu'un seul coup de mou suffit à vous faire sortir de ce qu'essaye de proposer le film. Avoir un ensemble riche et complexe est une bonne chose sur le papier, mais si c'est pour ce que le long-métrage devienne rapidement ennuyeux à force de mélanger tout cela pendant aussi longtemps, cela ne vaut pas le coup. Selon moi, la dernière heure est vraiment la plus longue en ce sens, c'est vraiment à ce moment-là que le film m'a totalement lâché. C'est bien d'avoir des thématiques complexes dans le fond, mais cela n'empêche pas le fait qu'elles peuvent être mal mélangées à la forme. Pendant 1 heure 30, voire pendant les deux premières heures, elles sont déjà essorées dans tous les sens. Et dans cette dernière heure, on essaye de relancer notre intérêt avec une dernière variation de celles-ci, sauf que cela ne marche pas, car les nouvelles idées du long-métrage s'avèrent moins marquantes, et donc moins efficaces. Le relâchement avait déjà un peu commencé avant, car on voyait parfois assez rapidement où le film voulait en venir. Mais grâce au style visuel du film, on réussissait à accepter un début de lassitude. Mais une fois que l'on entre dans ce dernier acte, les points qui seront soulevés vont être trop légers pour réellement nous surprendre. Et je parle uniquement de la façon de mettre en scène ces thèmes à ce moment-là, et pas de créativité ! Le film reste assez créatif et intéressant durant tout son long, mais selon moi, les délires qui sont proposés pendant la première partie sont bien plus explicites et forts que ceux de la deuxième. Par conséquent, je trouve que cette nouvelle réalisation d'Ari Aster laisse à désirer. Vouloir proposer un film dense et réfléchi, ce n'est pas une mauvaise chose. Mais vouloir le faire en pensant que cela suffit parfois, ce n'est pas forcément la même chose. À mon sens, ce projet aurait gagné en se retenant juste un peu. Pour conclure, un film qui n'est pas aussi réussi que prévu.