"L'oubli que nous serons" est le nouveau film de Fernando Trueba (Ópera prima, 1980 ; Belle époque, 1992 ; Two Much, 1995 ; Chico y Rita, 2011, ...). C'est l'adaptation du roman du même nom d'Héctor Abad Faciolince qui aborde la vie de son père depuis sa vision et perception. Ce dernier, Héctor Abad Gómez, interprété par Javier Cámara (Parle avec elle (Almodóvar, 2002) ; Les tournesols aveugles (José Luis Cuerda, 2008) ; Vivir es fácil con los ojos cerrados (David Trueba, 2013) et Sentimental (Cesc Gray, 2020), est un professeur de Médecine à l'Université, qui a défendu les droits de l'homme en Colombie, à Medellín, dans les années 1970 et 1980, jusqu'à ce qu'il fut assassiné en 1987.
L'aspect fondamental de "L'oubli que nous serons" est la photographie. Fernando Trueba en compagnie de son directeur de la photographie, Sergio Iván Castaño, oscille entre le noir et blanc, et paradoxalement, le noir et blanc correspond au présent tandis que la couleur se rapporte aux souvenirs d'Héctor Abad lorsqu'il était enfant et qu'il vouait un véritable amour à son père. Par ailleurs, la scène d'introduction met en scène le protagoniste durant ses études universitaires en Italie avant de revenir en Colombie, et on aperçoit le film Scarface de Brian de Palma, lorsqu'Héctor est au cinéma avec sa copine, qui permet de placer une sorte de "foreshadowing" sur les événements qui vont se dérouler, notamment quant à la violence des latinos. Le final de Scarface peut être mis en parallèle de celui de L'oubli que nous serons, ou est-ce simplement un clin d'œil ou une référence de cinématographique de Trueba ? À méditer...
Les personnages secondaires, soit la mère et ses six filles, sont très attachants, notamment lors des scènes musicales ou l'une d'entre elles chante en anglais au rythme de sa guitare. De plus, les deux acteurs protagonistes, le père et le fils crèvent l'écran de par leur interprétation de leur rôle et leur complicité naturelle.
Cependant, malgré les très bonnes qualités du long-métrage (photographie, scénario, ambivalence entre le noir et blanc et la couleur, le jeu des acteurs, la réalisations), un bémol serait la lenteur de la deuxième partie lors du retour d'Héctor en Colombie. Le rythme du début du film sur les expéditions de Héctor Abad Gómez et son fils, la relation familiale, les démarches du père pour la revendication des droits de l'homme, etc., s'amenuit au fur et à mesure de l'histoire, surtout dans le dernier quart d'heure.
En définitive, L'oubli que nous serons est un très bon film, réalisé par Fernando Trueba, qui montre encore une fois que le cinéma espagnol n'a rien à envier aux autres cinémas européens, notamment français et italiens... De films en films, le cinéma espagnol excelle : Lettre à Franco, Une vie secrète, Eva en août, Madre et maintenant L'oubli que nous serons. Des excellents films voire des chefs-d'œuvres pour certains !