Avec La Chèvre et Les Compères, Francis Veber nous promettait du très bon cinéma. Avec Les Fugitifs, il termine merveilleusement bien sa trilogie, entre des éclats de rire et une profusion de situations comiques complètement folles. Ne se contentant jamais d'un bête recyclage, il réussit le pari fou de toujours nous amener des gags nouveaux, sans jamais perdre sa maîtrise de l'humour et du divertissement. Passionnant de bout en bout, drôle comme jamais ( largement plus que Les Compères ), Les Fugitifs ne cesse de nous livrer des situations sacrément cocasses et diablement drôles. Cela viendra surtout du rythme parfaitement mené par la mise en scène de Veber, qui s'est encore amélioré avec le temps; en trois ans, il a pris de l'expérience, de la bouteille. En somme, il a étoffé son art. L'autre ressort comique ressortant le plus, c'est bien la personnalité haute en couleur de Pierre Richard. Autrement moins suicidaire que par le passé, il retrouve la personnalité maladroite de ses débuts, avec pertes et fracas. Les quiproquos sont géniaux et tellement bien tirés par les cheveux qu'ils n'abîment jamais la crédibilité de l'oeuvre; pire, ils la rendent encore plus folle. Nul doute qu'il ajoute énormément à l'oeuvre, avec sa stupidité qui va croissante et sa maladresse navrante. A ses côtés, un Depardieu toujours aussi charismatique et fichtrement bourru; faisant bien plus que permettre à Richard de faire le comique, il assume totalement son rôle, et nous offre à son tour des barres de rire. Dans l'échelle de l'humour, il est indépendant de Richard; il trouve facilement son chemin, marquant le film de sa personnalité. Un duo qui fait des merveilles, donc; fait d'autant plus surprenant que sur trois films, les deux acteurs ont du revenir au point de départ. Ne pas se connaître, jouer les inconnus comme s'ils se voyaient pour la première fois : nul doute qu'ils sont très talentueux. Autant l'un que l'autre, je précise. Toujours aussi différents, ils n'en finissent plus de plaisanter et de nous faire rire, de prendre sur eux des dizaines et des dizaines de soucis, tellement qu'on ne les compte finalement plus. Un excellent film, donc. Cela même s'il est imparfait : ses facilités scénaristiques et sa transition maladroite en milieu de film feront que la note supérieure lui sera enlevée. Mais n'en doutez pas, c'est une grande comédie intense et bien dosée ( comme toujours avec Francis Veber, réalisateur/scénariste de très grand talent ), magnifiquement bien relevée par un duo toujours aussi craquant. La fin d'une époque, pour le début d'une autre. Désormais, Depardieu a quitté Richard, aussi vrai que Pignon n'a pas fini d'embêter son monde. C'est sa destinée, notre destinée. Ainsi va la vie.