Franchement, quand je vois la note attribuée à ce film, j’ai du mal à comprendre ce qu’on peut lui reprocher… Car en 1994, "Harcèlement" traite d’un sujet sensible, encore tabou aujourd’hui. Cependant, on parle davantage du harcèlement sexuel perpétré par les hommes envers les femmes (dans de rares cas le plus innocemment du monde), mais beaucoup plus rarement celui commis par les femmes envers les hommes illustré par une affiche classée parmi les affiches de cinéma les plus sexy (si on excepte les films érotiques bien entendu). Et pourtant ça existe ! Avec le concours du scénariste qui s’est basé sur le roman éponyme de Michael Crichton (décidément, cet écrivain est très présent dans le 7ème art), le réalisateur Barry Levinson jette le pavé dans la mare. Quoi de mieux que de faire appel à des stars, dont la sublime Demi Moore qui nous régalera de sa plastique, et Michael Douglas qui de son propre aveu souffre d'une addiction envers le sexe ? Deux acteurs qui semblent finalement avoir un rôle à leur mesure, pour former un duo rêvé. Le fait est qu’ils vont s’entendre à merveille, en trois temps bien distincts : d’abord une certaine retenue, ensuite la fusion du désir partagé, et enfin... la distance. Le contexte est planté avec minutie et efficacité, puis vient le moment fatidique qui va donner le premier tournant du film : la descente aux enfers pour celui qui s’est fait voler le poste qu’il convoitait par sa tortionnaire. LA scène torride du film, parsemée de dialogues éloquents, et rythmée par des respirations trahissant le désir le plus vif. C’est à se demander si Michael Douglas ne s’est pas fait sauter dessus pour de vrai ! Ah le veinard ! Demi Moore est parfaite en femme éminemment carriériste et outrageusement manipulatrice pour parvenir à ses fins, avec son regard qui en dit long sans qu’il laisse la moindre équivoque
(notamment celui adressé à la femme de sa victime qui semble vouloir dire je vais vous écrabouiller comme une merde)
. C’est simple : elle me fait penser à une mante religieuse ! Tant sur le côté affectif que professionnellement. En revanche, et c’est là mon plus gros bémol concernant ce film, je trouve que Michael Douglas donne trop de sérénité à son personnage. Bien sûr, quelques failles bienvenues apparaissent ici et là, notamment lorsqu’il explique à son épouse pourquoi il ne lâchera pas l’affaire, et ce avec une telle conviction sortie tout droit de ses tripes qu'on le sent à ce moment-là complètement concerné. Après, le scénario est relativement convenu, surtout à partir du moment où il s’attache les services d’une avocate très en vue (interprétée par une très charismatique Roma Maffia) parce que celle-ci ne craint pas de faire éclater le scandale. Mais là où la réalisation est maîtrisée, c’est que chaque moment de LA scène va être passée en revue pour y être décortiquée, analysée, selon le point de vue de chacun des protagonistes bien sûr. Tout cela est orchestré par un patron qui ne pense qu’au bien commercial et financier de son entreprise, surtout à un moment où elle doit lancer un produit sensé révolutionner le monde informatique par le biais d’une fusion. Et tout y passe : les arrangements à l’amiable pas si amiables que ça, les complots, évidemment motivés par la présence d’une belle brune sculpturale à qui on ne peut rien refuser.
Ou presque.
Ce qui caractérise "Harcèlement", c’est son souci de réalisme, poussé jusque dans ses moindres détails. On savait Demi Moore bonne actrice, mais elle réussit à rendre son personnage bonne comédienne aussi, jusqu’à pleurer lors des auditions. Ça, c’est une performance ! Et puis il y a la bande son de la scène, que vous pourrez vous repasser à loisir si vous devez mettre un peu de piment dans votre vie de couple (lol !). C’est presque dommage que ce soit si court ! Hum ! Bref, passons… Mais en même temps, cette scène dure juste le temps qu’il faut. Plus long, ça ne l’aurait pas fait, et c’est ce qui donne toute la crédibilité de ce genre de scène. Mais ce souci de crédibilité est aussi exprimée lorsque Tom Sanders (Michael Douglas) est invité par son patron (Donald Sutherland dans un style de rôle peu enviable qui va beaucoup le poursuivre au cours de sa carrière) à le rejoindre dans sa voiture : les décors défilent en arrière-plan, mais on les a aussi en reflets dans la vitre, comme pour masquer plus ou moins une conversation peu avouable. Pour répondre à ceux qui pensent que la seconde partie ne sert à rien, je marquerai mon désaccord en disant qu’au contraire, elle n’est pas si inutile que ça. Il est vrai qu’on aurait pu s’arrêter à l’issue du combat juridique. Mais cela aurait été incomplet si on regarde de plus près la psychologie de Meredith : c’est une femme qui n’aime pas perdre, et de ce fait il est hors de question qu’elle perde la face, quoiqu’il en coûte.
C’est ce qui explique d’ailleurs qu’elle pète les plombs quand elle se rend compte qu’elle perd le contrôle de ses entreprises.
Aussi, je considère que l’absence de cette dernière partie aurait donné un film inachevé.