Copland. Titre de série B, me diriez-vous ! Surtout avec un tel concept : une ville, Garrison, dans le New Jersey, où n’habite que des flics (avec leur famille). Avec leurs propres règles et un shérif pour faire régner la loi. Mais franchement, de quelle genre d’autorité a besoin une ville de policiers ? À part régler des problèmes domestiques (mésententes avec le voisinage, voiture mal garée, excès de vitesse…). Sans compter que chaque habitant se connait, formant ainsi une grande famille et se serrant les coudes dans n’importe quelle situation. Un cadre bien tranquille. Même trop pour que l’on puisse en tirer quoi que ce soit ! Jusqu’à ce qu’arrive (et dès le début du film) l’élément qui va mettre le feu aux poudres.
Il s’agit d’un policier de renommée, annoncé comme mort (comme quoi il aurait sauté d’un pont) auprès du grand public après avoir provoqué un accident mortel sur la route. Avec des preuves le désignant comme coupable (alors que ce n’est pas le cas). Mais il est bel et bien vivant ! Ce sont ses camarades qui ont décidé de le cacher (pour ne pas que son image soit affectée par le drame) à Garrison, pour qu’il puisse y prendre une retraite anticipée. Et encore, il ne s’agit pas de la trame principale !
En effet, Copland préfère s’intéresser au shérif de Garrison, dont la vie va basculer avec cet élément déclencheur. Et pour cause, il s’agit d’un homme qui désire être policier mais qui ne peut atteindre ce titre à cause d’une déficience auditive (il est devenu dur d’une oreille en voulant sauver quelqu’un de la noyade, coincée dans une voiture). Du coup, il se retrouve shérif, représentant de la loi à la vie un peu trop tranquille et qui va découvrir (via l’élément déclencheur) que les gens qu’ils pensaient bien connaître ne sont pas aussi cleans qu’ils prétendent être.
Car si les personnages de Copland sont (quasiment) tous de la police, le film se rapproche bien plus d’un film de mafieux qu’autre chose. Ou quelques uns d’entre eux se croient tout simplement au-dessus de la loi pour laver leur linge. Se permettant quelques combines pour continuer à avoir une vie paisible à Garrison, même si cela conduit à la mort de certains d’entre eux (un sort qui est notamment réservé au policier caché par ses camarades). Du coup, nous n’avons nullement l’impression d’être en présence de policiers mais bien à des gangsters qui règlent leurs comptes, parfois de la manière la plus abjecte qui soit (laisser tomber quelqu’un du haut d’un immeuble pour ne pas que cette personne parle, par exemple).
Ainsi se présente Copland, où le concept ne réside pas seulement en la structure de son scénario. Mais surtout en la personne de Sylvester Stallone, acteur principal. Car sa présence et le style de Copland ont de quoi surprendre ! Le film n’étant pas un film d’action pure et dure à la Rambo, mais plus un polar. Où l’acteur n’use à aucun moment de ses poings ou de son côté bourrin. Nous avons là la place un Stallone qui fait tout pour casser son image machine de guerre : boudiné comme jamais (le comédien ayant pris vingt kilos pour le tournage), fragile (il hurle à la moindre douleur, se pavane une bonne partie du film avec un pansement au pif), se laissant constamment marcher sur les pieds (se présentant comme la bonne poire de l’histoire). Rendant son personnage attachant au possible. Un constat que l’on n’était pas prêt d’attendre de sa part, étant donné que ses rôles n’ont jamais fait dans la dentelle (à part Rocky Balboa peut-être, et encore !).
Même si Stallone surprend, il faut avouer qu’il ne fait pas le poids aux autres grands noms du genre qui participent au projet. D’immenses acteurs qui n’ont plus rien à prouver ! Il s’agit ni plus ni moins d’Harvey Keitel (Mean Streets, Taxi Driver, Reservoir Dogs, Bad Lieutenant, Pulp Fiction), de Ray Liotta (Les Affranchis) et Robert De Niro (dont la filmographie n’est plus à présenter). Sans compter les nombreux seconds rôles, tout aussi charismatiques que les principaux (Robert Patrick, Peter Berg, Michael Rapaport, Annabella Sciorra, Noah Emmerich…).
Mais bon, malgré un concept sympathique et un acteur dans un rôle inhabituel, Copland ne casse pas vraiment trois pattes à un canard. La mise en scène de James Mangold n’ayant rien de bien original (et cela se remarque pour chacun de ses films), préférant juste filmer les comédiens, avec une petite musique en fond pour l’ambiance. De plus, la fin de Copland en frustrera plus d’un, le film se terminant de manière brutale : tout est bien qui finit bien, point ! Les méchants sont morts, le shérif continue d’officier, il retrouve l’audition (une séquence du film le rend entièrement sourd). Tout en oubliant mettre fin aux trames secondaires (que devient le jeune flic porté pour mort après ces événements ? Stallone va-t-il se mettre avec la fille dont il est amoureux depuis le début ?). Des questions sans réponses qui auraient sans doute fait cliché, mais qui, au moins, n’auraient pas donné des airs d’inachevés au film.
Copland reste tout de même un polar hautement mené et superbement interprété, qui lança la carrière de James Mangold (Identity, Walk the Line, le remake 3h10 pour Yuma, Night and Day, Wolverine : le Combat de l’Imortel). Et qui présenta Stallone sous un autre jour, lui permettant à l’époque de remonter la pente niveau carrière (l’acteur ayant enchainé les échecs commerciaux et critiques). Un rôle dans lequel, reconnaissons-le, nous ne sommes pas prêt de le revoir !