Un an après La Liste Noire, Robert De Niro retrouve le réalisateur Irwin Winkler pour une seconde collaboration, cette fois-ci le remake du cultissime film noir Les Forbans de la nuit. Et si le film original est bien transposé à notre époque, changeant de décors et de thématiques (on passe de la lutte londonienne aux matchs de boxe new-yorkais), force est d'admettre que ce remake n'a pas du tout l'étoffe de son illustre prédécesseur. Car si Irwin Winkler est un excellent producteur qui a le nez pour les projets juteux, il n'est pas un metteur en scène de qualité et sa relecture du classique de Jules Dassin ne fait que rehausser le film de ce dernier... Alors que Dassin, dans un noir et blanc inquiétant, présentait essentiellement sa sombre intrigue dans la nuit, Winkler lui préfère le New-York diurne qui change le ton du film qui devient dès lors plus sobre, plus décontracté même et surtout moins inquiétant. Et si certains personnages et passages sont soit remplacés soit évincés, c'est surtout l'atmosphère générale qui se retrouve transformée, passant du polar progressivement étouffant au drame quelconque. De plus, avec un Robert De Niro cabotinant à outrance (la sympathie laisse peu à peu place à l'exaspération) et des séquences d'une rare platitude, le remake ne procure aucun plaisir ni aucune réelle tension et ce alors que les grandes lignes de l'histoire s'avèrent respectées. Le reste du casting aurait pu épauler le chouchou de Scorsese, comme la touchante Jessica Lange, le vieillissant Jack Warden ou encore le génial Alan King, mais hélas rien n'y fait : on n'y croit jamais et on ne s'attachera à aucun personnage. Plus l'intrigue avance vers la déchéance totale de notre loser de héros (devenu un avocat aux méthodes douteuses au lieu d'un petit rabatteur), plus l'effet escompté tombe à l'eau, jusqu'à un final tout simplement ringard reflétant parfaitement le ton global du long-métrage, soit l'inexistante prise au sérieux du sujet. C'est vraiment fort dommage car le scénario original, aurait pu être fabuleusement remanié pour les années 90 et devenir un très bon polar nouvelle génération (surtout avec De Niro) mais, en tentant de modifier la donne, fait du film noir une sorte de thriller dramatique inintéressant à la mise en scène ratée et à la direction d'acteurs quasi-inexistante. Mauvaise passe pour Robert De Niro donc, qui se réveillera quelques années plus tard pour nous gratifier de vrais chefs-d’œuvre.