L’éveil
Depuis son formidable 120 battements par minute de 2017, - couvert de prix, 2 à Cannes et 5 César entre autres -, on attendait le nouveau film de Robin Campillo. Le voici enfin. 117 minutes – sans doute un peu trop longues – à hauteur d’enfant, ce qui en fait l’originalité mais aussi les limites. Début des années 70, sur une base de l’armée française à Madagascar, les militaires et leurs familles vivent les dernières illusions du colonialisme. Je suis très gêné au moment de parler de ce film évidemment en grande part autobiographique mais dont j’ai eu beaucoup de mal à partager l’admiration que beaucoup lui portent.
Bien sûr le regard de ce petit garçon dont la conscience s’éveille et qui découvre les choses de la vie sans les comprendre tout à fait, est touchant, parfois bouleversant, mais est-ce vraiment passionnant ? Pour ma part, j’en doute. Aussi, la réflexion sur le colonialisme – ses bienfaits et surtout ses effets délétères -, passe-t-elle le plus souvent, ici, au second plan. Certes notre petit héros ressent la présence de sa famille et la sienne comme une anomalie mais la nostalgie domine tout le propos. Quand Campillo dit : On volait le bonheur de vivre sur cette île, il résume parfaitement le sujet de son propre film. Quant aux épisodes des aventures de Fantômette, qui nourrissent l’imaginaire du petit garçon, je les trouve personnellement trop longuets voire ennuyeux. Le film s’ouvre sur la chanson Stranger in paradise, un pur exemple d’un courant musical des années 50 inspiré par une vision fantasmée des îles. Pour conclure avec l’importance de la bande-son, les dernières images et le générique sont accompagnés par une chanson jubilatoire et mélancolique dont on nous dit qu’elle aurait accompagné la révolution malagasy, ce qui, dans le contexte de ce drame, signifie la fin de l’enfance et de l’innocence. Donc du bon mais aussi du moins bon, en particulier du côté du casting.
Même si le petit Charlie Vauselle crève l’écran, j’ai été très dérangé par l’interprétation du reste de la distribution. Nadia Tereszkiewicz et Quim Gutiérrez ne sont pas débutants, mais j’ai trouvé leurs jeux souvent distants et empruntés. Mais ce n’est rien à côté des « locaux » qui, hélas sont très mal à l’aise à commencer par Amely Rakotoarimalala, dont on oubliera très facilement le nom… Aussi cette faiblesse ternit-elle la force du conte politique sur la fin des illusions et les derniers spasmes de l’empire colonial français. Öur moi, la note d'intention est un peu trop présente, au détriment des émotions. Impression très mitigée.