Les plus utilesLes plus récentesMembres avec le plus de critiquesMembres avec le plus d'abonnés
Filtrer par :
Toutes les notes
traversay1
3 554 abonnés
4 847 critiques
Suivre son activité
4,0
Publiée le 15 mars 2022
Du petit matin à tard le soir, Julie, l'héroïne de A plein temps, ne cesse de courir. C'est le prix à payer pour quelqu'un qui a choisi de vivre à la campagne, mère séparée avec enfants, et qui travaille à Paris. Le film frappe par son réalisme et son rythme haletant, d'une gare à une autre, jusqu'au palace où Julie officie comme première femme de chambre. Ce pourrait être du Loach ou du Dardenne mais en plus accéléré, sur un mode du thriller social où le véritable suspense réside dans le moment où le stress va faire tomber son personnage principal, à force de tensions de toutes sortes, familiale, organisationnelle et professionnelle. Tout travail mérite galère et de ce côté-là Julie est servie, en pleine grève des transports qui accentue encore la pression sur ses épaules. Le film est maîtrisé et sans temps morts (les grincheux qui déplorent la supposée lenteur récurrente des productions françaises ne pourront pas se plaindre, cette fois-ci). A travers un destin individuel, le réalisateur Eric Gravel pointe aussi du doigt la violence sociale du monde d'aujourd'hui au point qu'à la crise physique et mentale de Julie répond celle de toute une organisation du travail fondée sur le rendement et la performance. Quasiment de tous les plans, Laure Calamy apporte de la lumière dans ce rôle de femme usée au bord de l'implosion. Elle est formidable. A remarquer aussi : la musique oppressante du film qui ne laisse aucun instant de répit ni de tranquillité. Sur la brèche et au bord de la stridence, toujours.
En 2017, Eric Gravel nous avait beaucoup intrigués et réjouis avec son Crash Test Aglaé. Il revient sur les écrans avec 85 minutes d’un drame quotidien mené tambour battant. Julie se démène seule pour élever ses deux enfants à la campagne et garder son travail dans un palace parisien. Quand elle obtient enfin un entretien pour un poste correspondant à ses aspirations, une grève générale éclate, paralysant les transports. C’est tout le fragile équilibre de Julie qui vacille. Elle va alors se lancer dans une course effrénée, au risque de sombrer. Une caméra à l’épaule aussi stressée que son personnage central nous fait parcourir Paris et sa lointaine banlieue dans les pas d’une femme somme toute banale mais sur laquelle s’abat en même temps tous les emmerdements du monde. Peut-être aurait-on dû un peu moins charger la mule pour gagner en réalisme. Trop c’est trop, même si la performance de l’interprète principale est extraordinaire. Car, le film repose entièrement sur les épaules – définitivement devenues bankables -, de Laure Calamy, qui, pour l’occasion, a reçu le Prix d’interprétation féminine à la Mostra de Venise… et c’est sacrément mérité. Je suis fidèlement la carrière de cette actrice depuis de 2014 et le formidable Zouzou de Blandine Lenoir. Depuis, même dans des films plus faibles, elle ne m’a jamais déçu, sachant toujours tirer son épingle du jeu. Ici, les Olivier Faliez, Evelyne El Garby-Klaï et tous les autres ne font que passer. On a d’yeux que pour elle. Mais revenons, avant de conclure, sur le scénario qui est du genre too much. Une femme qui élève seule ses deux enfants. L’ex injoignable qui ne paye pas la pension alimentaire, la carte bancaire bloquée, la nounou défaillante, un travail difficile dans un grand palace parisien, un logement trop loin surtout quand tous les transports sont en grève et que la voiture tombe en panne… et j’en oublie. A vouloir trop en faire, Gravel décrédibilise son propos. Heureusement, Laure Calamy… Le film ne sortira sur nos écrans qu’en mars 2022