Avant toute chose, un dramaturge de très grand talent, Sam Shepard, également extraordinaire scénariste comme dans « Paris Texas » de Wim Wenders. Shepard, cest une écriture typique américaine, très proche de Tenessee Williams, avec des personnages à vif, déchirés, sans arrêt proches du gouffre émotionnel. Shepard ou lunivers du sud américain, avec encore un pied dans le siècle des cow-boys et un autre dans lépoque moderne. De paysages ensoleillés, mais poussiéreux, des hommes aux manières rustres ayant comme seuls plaisirs, lalcool, les femmes et les chevaux. Mais Shepard ne serait pas cet immense dramaturge sil sétait contenté de ces seuls clichés. Il va compliquer les choses, en proposant une histoire damour archi-tordue, incestueuse, malsaine, avec en prime un règlement de compte freudien sur le père. Et puis, cerise sur le gâteau, il va sextraire du récit classique en proposant avec le personnage du père interprété par Hary Dean Stanton, un dédoublement de personnalité, recouvrant ainsi les époques dhier et daujourdhui. Un procédé de structure de récit qui déstabilise le spectateur tout en lui offrant des informations supplémentaires, nourrissant ainsi, goutte à goutte, le suspense. Comme souvent dans les adaptations du théâtre au cinéma, le travail principal consiste à dépasser le champ visuel unique et à créer du mouvement dans lespace, sans pour autant oublier lintensité dramatique. Ce nest pas chose aisée, et beaucoup se sont cassé les dents sur cette entreprise périlleuse. Altman, qui à lépoque possédait déjà une grande expérience derrière la caméra, parvient délicatement à sextraire du piège de limmobilisme tout en maintenant un espace très réduit proche du huis-clos. Pour résumer, une magnifique rencontre entre un dramaturge et un cinéaste, qui se sont réciproquement alimentés pour une alliance presque parfaite.