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Yves G.
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1,5
Publiée le 3 novembre 2020
Pendant un an, à Annecy et dans ses environs, la réalisatrice Manuela Frésil, déjà remarquée pour le documentaire qu'elle avait consacrée en 2013 aux conditions de travail dans un abattoir industriel ("Entrée du personnel"), a suivi des familles de demandeurs d'asile kosovars. Elle s'est surtout attachée à leurs enfants, à leurs joies, à leurs peines.
Filmer à hauteur d'enfants la terrible condition des demandeurs d'asile. Il suffit de regarder la bande-annonce de ce documentaire, d'y voir des angelots blondinets, grelottants de froid, obligés à dormir à la rue quand ils ne sont pas transbahutés d'un lieu d'accueil à un autre, dont le moins qu'on puisse en dire est que le confort n'y est pas excessif, pour avoir le cœur qui se brise et pour prendre fait et cause pour eux et contre les lois iniques qui leur impose cette situation.
Un instant de raison devrait toutefois nous inciter à plus de lucidité et à prendre le recul que le documentaire ne nous permet pas. Sans doute, entend-on en voix off les témoignages, déchirants, que des demandeurs d'asiles kosovars produisent devant l'Ofpra (l'établissement public qui instruit les demandes d'asile) ou devant la CNDA (la juridiction administrative spécialisée qui connaît des requêtes dirigées contre les refus de titres d'asile par l'Ofpra) : les demandeurs y semblent de bonne foi, qui invoquent les persécutions qu'ils ont subies dans leur pays en raison notamment d'unions mixtes mal tolérées ou de vendettas. Ces témoignages sont scrutés à la loupe par les agents qui les reçoivent et qui en apprécient le sérieux. Les demandeurs kosovars sont souvent hélas des réfugiés économiques (le Kosovo est le pays le plus pauvre d'Europe avec un taux de chômage estimé à 30 %) qui ne remplissent pas les critères leur permettant de bénéficier de l'asile en France.
Au-delà du débat passionnant qu'il soulève sur la situation des demandeurs d'asile en France, "Le Bon Grain et l'Ivraie" ne brille pas par ses qualités cinématographiques. Un jour ça ira, qui sur un mode similaire, suivait les enfants des locataires de L'Archipel, un centre d'hébergement d'urgence à Paris, souffrait déjà des mêmes défauts. Étaient autrement convaincants les documentaires sur l’accueil en Cada ("Les Arrivants", 2008) et sur l’apprentissage du français à des jeunes étrangers ("La Cour de Babel", 2013).
Vu dans la petite salle de Talloires à l occasion d une projection spéciale en présence de la réalisatrice. Ce film magnifique vous habitera longtemps. Entre joie enfantine , peur et tristesse les visages et regards de ces enfants sont magnifiquement filmés. Un film qui bouleverse et qui révolte, mais sans pathos, à voir absolument.
Un film très touchant, avec de magnifiques portraits d'enfants, sensible et joyeux malgré les conditions de vie difficile des familles en demande d'asile, trop souvent déboutées. On sent la complicité entre ces enfants et la réalisatrice, si discrète mais tellement à l'écoute. Pas de militantisme affiché, mais un message très clair pour sensibiliser chacun.