Quand le film se colle aux scènes, notamment du Château de ma mère, narration oblige, il semble soutenir difficilement la comparaison. Les collines sont les mêmes, l’image est magistrale, la musique sublime, mais ce qui s’y joue n’a pas la même force dramaturgique. Les scènes des deux précédents sont presque suffisamment toutes des moments d’anthologie dont Yves Robert avait le secret, pour ne pas pouvoir être bonifiées. Comme pourrait dire le poète imposteur Loïs de Montmajour, père d’Isabelle l’amour brulant de vacances de Marcel, dans une prose toute avinée à propos de cette comparaison : il en a l’odeur, il en la couleur, mais il n’en a pas le goût, c’est le pastiche du pastis…
En revanche, quand Le temps des secrets nous parle d’autre chose et qu’il s’émancipe, il devient en effet nettement plus captivant. Avec une petite poésie qui opère et notamment dans ce qui est montré du rapport de Marcel aux adultes en général et à ses parents en particulier.
Au final, ceux qui n’auront pas vu les deux premiers, sortis il y a plus de 30 ans (déjà…) pourront aimer Le temps des secrets avec passion. Les autres, peut-être moins, ou « un peu… mais guère », comme l’écrivait Pagnol, jouant sur les euphémismes. Excès de nostalgie, constat implacable tout Pagnolesque de l’inexorable temps qui passe, ou véritablement, un film tout simplement moins anthologique, chacun-e- se fera bien sûr son opinion. Le point n’est par ailleurs peut-être pas final, car la trilogie de Pagnol est en fait une tétralogie, avec en dernier chapitre Le temps des amours, ultime tome des souvenirs d’enfance inachevé et publié à titre posthume. Sa mise à l’écran viendrait clôturer les délicieuses aventures drôlement humaines de Marcel. Entre temps, profitons et prenons tout ce qu’il faut prendre, car comme disait l’écrivain d’Aubagne : « Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d’inoubliables chagrins. Il n’est pas nécessaire de le dire aux enfants… »