Le cinéma coréen confirme de plus en plus son sens du spectaculaire, lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre une catastrophe à grande ampleur. Ici, Jae-rim Han connecte le ciel et la terre dans un conflit de vie et de mort. Dans les deux cas, les personnages vont agoniser, tout comme le spectateur qui se laissera séduire par le mélodrame convenu, qui désamorcera un peu toute cette tension factice, planant au-dessus de nous. On pensera notamment à l’apocalyptique « Dernier train pour Busan » de Yeon Sang-ho et au « Tunnel » de Kim Seong-hun, où la confiance devient la clé du discours et du divertissement. De même, « Blood Red Sky » aurait voulu faire partie de cette fantaisie, mais sans succès, en portant sur lui les mêmes défauts que ce vol commercial aux dents affûtés.
Malheureusement, le récit brasse beaucoup trop d’éléments sans un fil conducteur à suivre, pour se laisser convaincre. On navigue entre une ribambelle de fonctionnaires se déchirant le chou au sol et une masse névrosée dans une carlingue à vingt-mille pieds d’altitude. Tous partagent cependant un point de vue honnête sur les dysfonctionnements de leur société, qui les poussent les individus à se retrancher derrière leur égoïsme, à peine déguisé. Le collectif ne peut donc pas vaincre, s’il n’est pas soumis à une vérité, différente de la peine fatale qui les attend en bout de piste. La nation coréenne se place ainsi sur sa propre ligne de mire, où les étages sociaux vont peu à peu s’effondrer, afin de laisser place à un chaos, qu’il convient de résoudre, au nom de la patrie et d’une famille à sauver.
Un époux (Song Kang Ho) fait donc tout son possible pour contrecarrer les plans d’un terroriste (Im Si Wan), qui ne jure que par sa malveillance. Le film prendra ainsi le temps de faire l’inventaire de tout ce qui cloche dans les actions de cet homme, déchu et condamné à la potence. À côté, un médecin et père d’une fille (Lee Byung Hun) doute quand il s’agit d’épargner des vies. La majorité aura toujours le dernier mot dans cette situation, chose que devra démentir la ministre (Do-Yeon Jeon), chargée de mettre un terme à la pagaille aérienne. Les médias s’automutilent et tout ce beau monde part en vrille, aux dépens de passagers, qui se livrent à des joutes oratoires assez vaines dans le fond.
Qu’il soit question d’une crise sanitaire dans le rétroviseur ou bien un recyclage sans fin du cynisme nationale, « Défense d’atterrir » (Bisangsuneon) ne mâche donc pas ses mots, à l’image de ses personnages, dont la vérité et la culpabilité finissent par éclater. Jae-rim Han tire la sirène d’alarme et transforme son avion en une météorite que personne ne veut réceptionner. Dommage qu’on se refuse d’assumer les risques, là où l’impact aurait été encore plus dramatique que ce que l’on nous force à croire, à savoir une humanité triomphante.