Passé les instants idylliques de la naissance de leur premier enfant, un couple se retrouve au bord du burn-out après six mois de colocation avec ce bébé prenant un malin plaisir à brailler en permanence. Par chance, la jeune maman se souvient avoir trouvé un vieux livre contenant une berceuse en hébreu dans les affaires de sa sœur et se met à l'interpréter à son nourrisson. Le chant calme miraculeusement l'enfant mais attire une mystérieuse présence qui va créer de biens pires soucis aux apprentis parents...
Dans la droite lignée de sa filmographie modèle de produits d'épouvante totalement génériques ("Annabelle", "I Wish: Faites un voeu" ou "The Silence"), John R. Leonetti persiste et signe en ajoutant une nouvelle ligne à son médiocre C.V. de cinéaste du genre avec ce "Lullaby", où une énième présence démoniaque parasite la vie d'un jeune couple en vue de lui faire surmonter ses difficultés à embrasser pleinement son statut parental. Évidemment, le bébé prenant ici la forme d'une machine à pleurs inarrêtable va être l'occasion d'aborder en filigranes la dépression post-partum qui peut toucher une mère et un père débordés par une progéniture envahissante pendant que, de son côté, la présence surnaturelle va incarner les penchants les plus dangereux pouvant émaner d'une telle situation.
En cela, et au-delà du moyen très opportun d'un vieux livre pour y parvenir, il faut bien reconnaître que "Lullaby" ne fait pas appel au mythe le plus idiot dans un tel contexte, se tournant vers la figure de Lilith -et notamment sa variation hébraïque- qui la pose en danger extrêmement redoutable pour les nourissons d'êtres humains. L'utilisation de ce démon sera clairement la meilleure idée de ce "Lullaby", son modus operandi offrant certaines spécificités grâce aux apparitions d'un bestiaire étonnant dans son sillage (au potentiel hélas bridé par des CGIs ratés), les environnements de sa "tanière" et surtout Lilith en elle-même, les quelques scènes finales la mettant plus au centre des événements sont sans doute les instants les plus marquants de l'intégralité du film.
Malheureusement, malgré un dernier acte qui aura le mérite de conjuguer ces éléments de façon un peu plus efficace que le reste, toute la partition de cette "Lullaby" donnera le sentiment d'avoir déjà été entendue des dizaines de fois, comme un énième produit interchangeable d'épouvante US, au déroulement captif de standards mainstream éculés depuis bien trop des années et n'étant plus en mesure de ne surprendre personne. Autant en termes de frissons que de twists, "Lullaby" ne fera que constamment trahir ses notes écrites et jouées en pilote automatique, là où son démon aurait mérité un traitement bien plus audacieux pour ne pas être emporté instantanément dans le néant de l'anecdotique. Et, quelque part, voir Oona Chaplin, petite-fille de Charlie (et de l'héritage que cela induit), être mise en scène dans un film aussi formaté, où l'on peine à déceler la moindre once de créativité pour s'imposer un minimum en son registre, ajoute une couche de tristesse supplémentaire à une production n'en ayant déjà pas besoin.
Bref, l'air de cette "Lullaby" s'est déjà échappée de notre tête à l'heure d'écrire ces dernières lignes. Et ce n'est pas plus mal, Lilith ne fera ainsi plus souffrir personne.