C’est Adam McKay, réalisateur de ‘’Don’t Look Up’’, qui l’a dit : « Mon but est de filer des grands coups de pieds dans les couilles des gens ». Ce programme cinématographique est donc, apparemment, à l’ordre du jour ici et là (et merci pour les non-couillu.es). Surtout le 24 décembre, date de sortie sur Netflix de la nouvelle satire d’un réalisateur qui, avant, était très drôle et très doué (‘’Anchorman’’ , ‘’Frangins malgré eux’’, ‘’Very Bad Cops’’) mais qui, comme d’autres, a cru bon de troquer la régression contre la transgression.
Mauvais calcul ; ‘’Don’t Look Up’’, comme ses précédents films ‘’The big short’’ et ‘’Vice’’ , est un cinéma à la peine, qui se rêve quelque part entre Michael Moore et ‘’The wolf of Wall Street’’ mais qui n’est jamais l’un, et encore moins l’autre. Et comme souvent, il est plus facile de régresser que de transgresser. Le nouveau film de McKay, qui choisit de bien tomber entre crise politique mondiale, écologie et mensonges d’état, ressasse les perpétuels boulets rouges en plastique typique de l’hypocrisie de studio ; un cinéma américain donnant ouvertement dans l’autodérision violente pour mieux donner ses leçons. Le film tente donc une énième relecture du blockbuster écervelé type ‘’Independance Day’’ en faisant appel, comme pour asseoir l’intérêt du truc, à une ribambelle d’actrices et d’acteurs respecté.es (DiCaprio, Lawrence, Blanchett, Streep, etc.) pour… ne rien jouer. C’est effarant de voir comment un film à dizaine de millions de dollars de cachets peut ne servir qu’à si peu dans le domaine du jeu et du timing comique. Et comment la farce échevelée n’est en fait qu’un vaste programme drôlement sérieux.
Et encore, oublions l’ironie d’un film qui se veut politique et culotté alors qu’il est fondu dans le moule de la production Netflix de Noël. Partons du principe que les deux peuvent marcher ensemble, même si le film donne la même impression contradictoire qu’un fast-food vegan. Mais que nous dit McKay avec cette satire ‘au vitriol’ ? Rien, je le crains. C’est une petite console d’effets ringards et faciles, que l’on a déjà vu tant de fois : plaisir de la vulgarité, caricature des figures du pouvoir, acteurs qui cabotinent (au mieux) ou qui s’ennuient (au pire), mash up de fin du monde, de cynisme, de weed, de Elon Musk à peine déguisé, de militarisme…
Un coup de pied dans les couilles, ça ? C’est en fait la satire américaine de base, que l’on faisait déjà dans les années 90 avec un ton beaucoup moins agaçant et une audace formelle autrement plus joueuse. Ou alors c’est donner à la transgression un bien pauvre impact… il faut voir en quoi l’aberration finale contente tout le monde (l’humanité meurt, la fin du monde a vraiment lieu ; super-audace!). Le discours sur les coupables, puissants qui ne font rien, et les alerteurs qui n’ont pas été entendus… mascarade!
McKay ne donne pas de coup dans les couilles ; il tire des fléchettes en plastique.