Don't look up a été diffusé à grand renfort d'effets marketing le 24 décembre, histoire de créer un buzz planétaire salutaire, le sujet (et l'heure) étant grave et le film devant réveiller les consciences grâce à Netflix, seul producteur à avoir accepté de financer ce chef d'oeuvre, véritable allégorie drôlatique de la crise écologique. Vaste projet !!
Let's get straight to the point... j'ai détesté.
Attention, je n'ai pas détesté ce film parce qu'il serait nul. Pas du tout! J'ai ri, trouvé certains éléments de caricature d'une justesse confondante et le côté grand guignolesque du jeu de quelques acteurs réjouissant (bien qu'assez lassant après 1h30).
Présenté comme un divertissement, ce film m'aurait divertie.
Non, si je l'ai détesté, c'est parce qu'il se prend au sérieux (lire les interviews de l'équipe), est profondément démago, facile, d'une bonne conscience ahurissante et autocentré. Je doute par ailleurs qu'il amène qui que ce soit à se poser la moindre question sur la crise écologique ; son existence n'ayant d'autre objectif que de renforcer la position de Netflix, dans la guerre féroce que se livrent les plateformes de contenu audiovisuel. Point.
Bref, censé dénoncer le cynisme ambiant, j'ai détesté ce film, parce qu'il me paraît en être une illustration éclatante.
Mais, entrons un peu dans le détail :
on a 3 scientifiques, qui incarnent la raison, le sens commun et préviennent le monde qu'un énorme caillou, venu de l'espace, va anéantir la vie sur terre.
A partir de là, ils se heurtent à des politiciens hyper cyniques et/ou pas futés, à des média et des hommes d'affaires hyper cyniques, à des pop stars, à la fois cyniques et pas futés et à des populations pas futés, mais ce n’est pas de leur faute, car ils sont manipulés par des politiciens, des media et des réseaux sociaux hyper cyniques et/ou pas futés, contre lesquels ils ne peuvent rien faire
.
Il n’y a aucune autre force en présence et tout ce petit monde est américain.
Alors, il parait que ça "décoiffe", "envoie du lourd", "remet les pendules à l'heure" et pourquoi pas les vaches au milieu du pré?
Satire géniale, fable visionnaire, parabole anticipatrice, allégorie cosmique..., chacun y va de son hyperbole, pour exprimer son admiration.
Mais remettons la vache au milieu de son pré justement.
Qu'est-ce qui fait la force d'une satire par exemple? Eh bien, souvent, le fait que sa critique repose sur la peinture d'une société ou d'un milieu où tous les personnages sont plus ou moins affreux et/ou ridicules. Dans une satire, on rit de personnages pour lesquels on n’éprouve peu ou pas du tout d'empathie et auxquels on n'a aucune envie de s'identifier.
Ce film fonctionne de manière exactement opposée et, signe d'une époque qui aime les clins d'œil racoleurs à un public infantilisé, présente, à côté des hypers cyniques et des pas futés, des supers gentils (les scientifiques) pas complètement infaillibles, mais quand même cools et dont on sent qu'ils aiment leurs familles, leurs amis et, s'ils en ont, leurs chiens.
Ouf, le spectateur n'a pas à réfléchir un instant! Grâce à une mise en scène d'une subtilité de char russe, il s'identifie immédiatement aux personnes désignées : effet de satire d'autant plus annulé que, les supers gentils,
ayant échoué dans leurs (très faiblardes) tentatives d'éviter que le gros caillou ne percute la terre, deviennent des victimes
. Youpi, rien à faire, on est foutus. Sors la bûche Simone, on fête Noël!
Dans une fable maintenant, il y a une morale à la fin. Or comment se termine ce film ?
Pas par la disparition de l'espèce humaine, mais par des petites pirouettes rigolotes : mort de la présidente hyper cynique dévorée par une espèce de grand oiseau et plan final sur son fils pas futé, faisant des selfies, alors que l'humanité à disparu.
Bref, la morale de l’histoire est exactement l’inverse de ce qu’elle prétend dénoncer (ou tenter de prévenir) pendant tout le film. Car on peut quand même bien rigoler non ? Et surtout, on reste cools ! Souriez, vous serez filmés,
même après la fin du monde.
Ouf, j’ai failli poser mon portable.
Last but not least : à l’heure d’un monde multipolaire, il n’y aurait que les américains pour sauver le monde ? Vraiment ? Vous y croyez encore amis américains ? Si tel est le cas, ramenez-nous Schwarzy tout de suite. Au moins, il faisait le job lui!