En règle générale, j'accroche bien avec la façon que François Ozon a de raconter des histoires. "Grâce à Dieu", "Le temps qui reste" ou encore "Dans la maison" sont probablement mes oeuvres préférées du réalisateur. Avec "Tout s'est bien passé", il s'empare du récit autobiographique d'Emmanuèle Bernheim où l'auteure relate la fin de vie de son père, qui, suite à un grave AVC, demande à avoir recours au suicide assisté. Ce sujet tabou et douloureux est loin d'être souvent abordé au cinéma, et à la vue de la bande-annonce, on se dit que ça risque fortement de pencher vers le pathos... Mais la mise en scène d'Ozon, malgré un hyper-réalisme assumé, ne cherche pas à tirer gratuitement les larmes du spectateur. Au contraire, la tristesse de la situation ne plombe pas et laisse place à des moments plus lumineux et détachés. Car, comme à chaque fois où il est question de mort, la vie bat son plein pour lui faire face ! Entre les souvenirs d'enfance, le caractère effarouché de l'octogénaire, les secrets qui refont surface, la solidarité entre soeur et l'espoir en l'avenir, "Tout s'est bien passé" réussit à capturer l'essentiel de ces parenthèses de vie particulières, sorte d'entre deux entre élan de vie et profond chagrin. Après, c'est sûr, il faut être d'aplomb pour regarder ce film, et ne pas avoir été exposé à un deuil récent, au risque d'en sortir plus secoué que prévu... Même si j'ai trouvé le sujet de l'euthanasie intéressant, que la question de la mortalité et de l'acceptation sont pertinents, je suis resté en distance face à cette histoire trop réelle, trop crue, sans doute trop proche de situations vécues. J'ai eu du mal avec le grimage d'André Dussolier et avec ce marasme d'affects et de sentiments réprimés. Sophie Marceau est très simple mais superbe, pareil pour Géraldine Pailhas et Charlotte Rampling, plus en retrait... En fait, "Tout s'est bien passé" raconte beaucoup, résonne beaucoup, touche beaucoup mais je ne vois pas vraiment l'intérêt de l'adaptation cinématographique d'une telle oeuvre. Très respectueux du livre original, on en oublie la direction de François Ozon, qui semble s'effacer et ne prendre aucune initiative ou liberté dans cette histoire. J'aurai été curieux de le voir sous la forme d'une pièce de théâtre par exemple, qui aurait peut-être aidé à voir la chose sous un autre angle...