Durant sa très riche et prolifique filmographie amorcée il y a maintenant près de vingt-cinq ans avec « Regarde la mer » puis « Sitcom », François Ozon a abordé beaucoup de genres, a connu des gros succès ainsi que quelques bides commerciaux et il s’est sans conteste fait un nom dans le paysage cinématographique français. Après deux excellents long-métrages au sommet de son œuvre, « Tout s’est bien passé » se révèle comme un Ozon mineur, imparfait et pas aussi réussi qu’il aurait dû l’être avec un tel sujet. Après avoir magistralement traité de la pédophilie au sein de l’Église avec « Grâce à Dieu » et avoir titillé notre fibre nostalgique avec le sublime « Été 85 » (l’un de ses plus beaux films), il déçoit donc un peu avec ce drame sur la maladie et l’euthanasie. Sur le même sujet, le magnifique « Quelques heures de printemps » était bien plus fort, émouvant et tout simplement réussi.
D’emblée, il y a quelque chose qui nous dérange ou qui nous laisse circonspect : l’interprétation d’André Dussollier, bizarre et indéfinissable, dans la peau de ce père victime d’un AVC qui le met en fauteuil roulant et lui paralyse une partie du visage. Certes, le brillant acteur s’est investi comme toujours, cela se ressent. Mais de le voir débiter ses répliques de la sorte avec le visage si abîmé, on hésite entre maestria et ridicule et confirme que ce qui passe à l’écrit ne fonctionnera pas forcément à l’écran. On finit par s’habituer mais au début c’est dérangeant et peut-être qu’Ozon aurait dû s’affranchir du roman et de cette histoire vraie au niveau des séquelles physiques de manière à pouvoir jauger comme il se doit le travail de l’acteur. Ensuite, les seconds rôles sont, au choix, inutiles ou pas assez approfondis pour la majorité. Entre un amant ridicule ou des acteurs qui ne font que passer (Charlotte Rampling, Jacques Nolot, ...), on dirait que François Ozon a utilisé une partie de son carnet d’adresses pour donner un casting prestigieux mais superflu à « Tout s’est bien passé ». Ou alors qu’en adaptant le roman, il n’a pas su couper dans le lard ou donner plus de poids à ses personnages secondaires. Il aurait dû se concentrer sur le père et ses filles, cœur du récit, ces dernières étant parfaitement incarnées par Géraldine Pailhas et Sophie Marceau, tout en justesse et sobriété.
Le long-métrage déçoit également sur le pan de l’émotion. Ozon fait le choix d’éviter les séquences à haute teneur lacrymale et de sombrer dans le pathos. Très bien, mais l’effet inverse se produit et « Tout s’est bien passé » manque cruellement d’affects hormis la scène des adieux. Pour un film sur un sujet si grave et lourd, cela relève presque de l’exploit mais pas dans le bon sens, car le film n’est pas non plus joyeux et ne choisit pas de prendre ce thème sous l’aspect comique ou feel-good. De plus, on finit par trouver le temps long et l’ensemble un peu lent avant d’arriver à la conclusion attendue. Enfin, des choix narratifs discutables, certainement hérités du roman, tels que des flashbacks ratés ou des digressions inutiles qui alourdissent le propos et le détourne de son sujet principal (comme la sexualité du père, voire même les rapports avec ses filles, mal cernés). Des défauts comme une mise en scène peu inspirée qui finissent de rendre cette œuvre brinquebalante et pas vraiment satisfaisante. Allez François, ça arrive et c’est pour mieux se retrouver la prochaine fois.
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