N'étant pas un expert sur le sujet ni même un adepte de documentaires, j'avoue avoir été touché par "Petite Fille". Ce documentaire témoigne du combat d'une fillette de dix ans, Sasha, née dans un corps de garçon. Combat car depuis l'âge de trois ans, elle se sait fille. L'école dans laquelle est scolarisée Sasha ne veut pas entendre parler de questionnement du genre, une professeure de danse est allée jusqu'à l'expulser de sa classe et ses camarades se moquent d'elle. Tout ça, on ne le voit pas mais c'est là tout le fond du problème. C'est par le biais des interventions de sa mère, gorgées de tolérance, d'amour et d'inquiétude, qu'on l'apprend. Sa soeur ainée, ses frères et son père mènent aussi ce combat au quotidien. C'est donc à partir du cocon familial qu'on découvre la vie de Sasha alors qu'on sent que le hors-champs des batailles menées par cette famille est très vivement violent, présent et déterminant. En tant que spectateur novice en la matière, il est facile de rentrer en empathie avec la souffrance de Sasha, pas très bavarde mais mature pour son âge, et avec l'inquiétude omniprésente de la mère et ses crises de larmes. On assiste, avec elles, à leur périple pour rencontrer une pédopsychiatre spécialisée en dysphorie de genre, vilain terme que la science utilise pour désigner la situation de l'enfant. Ces échanges sont intéressants car ils ouvrent les yeux sur une réalité qui peut nous être totalement étrangère et énigmatique. On observe aussi la mère parler à la place de son enfant qui préfère se taire et écouter. Ça en dit beaucoup sur le schéma familial et les préoccupations de cette dernière. Avec du recul, j'ai quand même l'impression que le film parle beaucoup "pour" Sasha, la condamnant obligatoirement à une vie difficile, pleine d'épreuves et de rejets. Mais qui sait si ce sera si horrible ? Il y a une note d'espoir quand on observe l'innocence de l'enfance lorsqu'une copine de classe se rend chez eux pour jouer avec Sasha. Cela dit, "Petite Fille", loin de tout militantisme, souligne les verrous que notre société doit faire sauter pour faire accepter la différence. J'ai trouvé aberrant, par exemple, le fait que des professionnels de l'éducation nationale soient absents à la réunion d'information organisée par la mère en présence de la pédopsychiatre ou encore qu'on oblige Sasha à porter un costume "de garçon" en cours de danse, alors qu'elle n'est entourée que de filles en tenue bleue pailletée... Il y a du chemin à faire, et pas que pour les principaux concernés.