Un homme solitaire et blessé, une gamine douée de pouvoirs qui est recherchée pour être liquidée... Il était pas dispo, Pedro ? The Creator flirte souvent avec The Mandalorian dès que le binôme se forme, avec Rogue One à chaque image bourrine qui fait des parallèles avec la Guerre du Vietnam, avec Stranger Things (la gamine chauve sortie de nulle part, toute puissante, et traquée par les Ricains)... Oui, on a eu largement le temps de penser à autre chose, durant ces interminables 2h20 qui peinent à avoir une identité propre, un tempo, et surtout une cohérence. On s'arrête quand même un instant sur le grand bon point de ce film, à savoir l'image. Granuleuse, très légèrement imparfaite, elle donne une sensation de réalisme bluffant, faisant passer les robots pour des acteurs de documentaire, couplé à des trucages numériques qui peuvent facilement faire pâlir les récents Marvel qui ont pourtant trois fois plus de budget. Visuellement, on s'est souvent surpris à oublier la numérisation et les fonds verts, un petit exploit dont Gareth Edwards peut être fier. On n'aura clairement pas la même amabilité envers les scénaristes, qui ont enchaîné les bourdes (légères à plus visibles) jusqu'à créer un film joli à l'extérieur, mais sonnant creux à l'intérieur. Ainsi
les deux androïdes qui parlent anglais entre eux alors que les humains ne sont plus là, le héros qui galère à grimper à l'échelle alors que la gravité est nulle, une longue résurrection "numérique" d'une personne dans le coma profond depuis cinq ans alors que celle d'un soldat mort depuis moins de quatre minutes était un fiasco au début du film, le robot-bombe qui a été créé avec des fines jambes plutôt que des chenilles ou des roues (il a du bol de tomber sur des nuls qui tirent au-dessus de la taille), le soldat qui n'a pas le réflexe de sauter de l'hélicoptère quand il voit qu'il a une bombe dans le dos (alors que cela fait partie des bases d'enseignement de l'Armée)... Beaucoup de facilités narratives aussi : le fait que la gamine ne dise jamais "Papa", juste pour le dégainer dans la séquence-violons finale (très niaise), la règle de "les robots ne peuvent pas tuer leur Déesse" qui déboule à l'improviste uniquement pour justifier la scène de débranchement (encore une fois, très niaise) par le héros lui-même...
On se rend compte assez vite du décalage assez criant entre le soin apporté à l'image (la photo est superbe, le grain d'image est une audace réussie, les effets numériques de petits bijoux) et la facilité du script, les questions sans réponses (les robots qui regardent du porno...alors, ils ont une sexualité ? Des émotions ?, idem le titre honorifique de Nimarta qui peut visiblement se transmettre sans que l'héritier ne soit le créateur de quoi que ce soit... On ne comprend pas les détails, et c'est très frustrant), l'inexistence de la musique (on tombe de son fauteuil en voyant "Hans Zimmer" en compositeur de pareille soupe indétectable), le jeu un peu poussif des acteurs, une morale pro-IA qui n'est pas franchement de bon ton aujourd'hui. Ce proto-Rogue One mélangé à du The Mandalorian manque d'équilibre entre la forme et le fond, devenant vite très long et vain, un bel emballage vide. Ils nous manquent, le Pedro et son nain vert à grandes oreilles...