(...) Au niveau mise en scène, on est face à un western qui exploite plutôt bien ses décors "urbains" (la ville est bien reconstituée, avec une grande attention portée sur les détails, avec des costumes et des accessoires plus réalistes que dans les westerns des années 50 et 60). Dans la décennie 1970, la reconstitution est plus crue, plus crade, avec beaucoup de poussière, de sueur et de saleté. L'image est également plus terne, plus crue malgré l'utilisation du Technicolor mais on est loin de la flamboyance des images des westerns classiques utilisant cette technique, et on est également très loin des fulgurances stylistiques d'un Ford. Bien évidemment, le western spaghetti est passé par là et le cinéma de Sam Peckinpah aussi. "L'homme de la loi" reprend donc certains tics de ces différentes approches, comme une violence beaucoup plus graphique et un abus de zooms pas toujours très gracieux. Winner est également un cinéaste tourné vers l'efficacité, c'est à dire qu'il effectue peu de prises. Ainsi, il a la chance de pouvoir se reposer sur des comédiens talentueux et qui n'avaient sans doute pas trop la patience, la nécessité ou la volonté d'en faire plus. La mise en scène est donc loin d'être élégante tout en étant un peu plus que fonctionnelle (le montage est tout de même de qualité, dynamisant certaines scènes d'action et quelques travellings sont agréables). En fait, ce qui est plus intéressant dans le film, c'est donc le portrait de ses personnages et en creux, le récit d'une Amérique en pleine mutation (le film se déroule presque un siècle avant sa fabrication). Ainsi, il est aisé de faire des parallèles entre la ville de Sabbath dans le film et ce que vivait le pays à l'époque. Maddox est une relique du passé, un homme qui se bat avec des armes (la guerre du Viêt-Nam fait encore rage à l'époque). Bronson, le rancher, est un pragmatique. Dans son monde, tout s'achète avec de l'argent, y compris la vie d'un mort. Après la conquête de l'Ouest, les hommes comme Maddox et Cotten (Ryan dans le film) sont des anachronismes. Et si Maddox apparaît comme le chevalier blanc au début, il ne cessera de se révéler ambigu tout au long du film. Sa rencontre avec une ancienne conquête, mariée à l'un des hommes qu'il recherche, permettra de travailler le personnage et d'en faire un peu plus qu'un simple justicier. Veut-il réellement se caser ou se berce-t-il d'illusions pour se convaincre que c'est la chose à faire ? Est-il un être épris de justice ou un tueur avec une étoile au veston ? Si l'exploitation de ces thématiques est loin d'être neuve dans le genre (tout comme la ville sous la coupe d'un riche propriétaire terrien, on peut même dire qu'il s'agit de codes du genre), son traitement doit beaucoup à Winner qui y inclut des pistes que l'on retrouvera dans ses futurs travaux. Ainsi, la ville de Sabbath est peuplée d'êtres veules et couards, qui rêvent de sécurité dans leur ville mais qui détestent ou méprisent ceux qui leur offre cela (l'éternel combat entre la sécurité et la liberté). Les employés de Bronson ne sont pas tous des tueurs ou des saints, il y a de tout. On y trouve l'employé fidèle à la ligne inflexible, le fils qui vit dans l'ombre de son père et qui veut en sortir (rôle un peu sous-exploité), l'excité de la gâchette qui veut en découdre, le jeune qui veut se prouver qu'il est un homme de la trempe de Maddox, l'honnête fermier qui est là pour la paie ou encore le lâche de service bref, c'est un échantillon de l'humanité, dans toute sa complexité, dans toute sa diversité. En soi, le film n'est pas désagréable, et il démarre même plutôt bien. Le souci vient d'un 2ème acte un peu faiblard, qui s'enfonce dans des problématiques qui ne font pas avancer l'histoire correctement, des péripéties pas toujours palpitantes et le final, pour expéditif qu'il soit, rehausse un peu le tout en donnant un virage définitivement troublant au personnage de Maddox, qui se dévoile dans toute sa cruauté et même son hypocrisie. (...) La critique complète sur thisismymovies.over-blog.com