La petite fille trottine dans la maison. Un ventilateur essaye de dissiper la chaleur ambiante, un dessin animé passe à la télé, des jouets et des crayons de couleur sont disposés sur l'étagère de la chambre. Bouée autour de la taille, lunettes de piscine rivées aux yeux et gestes enfantins, quelques plans suffisent pour qu'on s'attache à elle. Un coup d'œil dans l'eau, elle hésite, plonge dans la piscine, puis disparaît. Comme absorbée dans un plan de coupe qui survient trop brusquement et nous prend au dépourvu. Seuls restent des bruits d'eau suivis d'un cri de la mère. "Erin!", hurlement de désespoir, posant un nom sur ce personnage dont le film venait de nous faire la promesse pour nous le retirer aussitôt. Le dessin animé continue, dans le vide, marquant l'absence d'Erin qui va hanter toute la suite du film.
Mamá, mamá, mamá nous fait traverser l'épreuve du deuil. Mais contrairement à une majorité de drames lourds et larmoyants, une certaine candeur habite le film qui se focalise sur le point de vue des enfants, jeunes filles dans l'innocence et la pureté de leurs robes blanches d'été. La mère, elle, terrassée par la perte de sa fille, pleure et pousse des cris déchirants depuis une chambre dans laquelle elle se tient enfermée. Mais comme si cette disparition dépassait l'entendement émotionnel de Cleo, la grande sœur, et de ses cousines, celles-ci semblent plus perdues et désemparées par l'attitude des adultes que par le décès d'Erin. Son souvenir continue d'ailleurs de planer sur leurs jeux d'enfants autant que sur le film qui, émaillé d'images d'archive de la fillette, caresse plus la tendre mélancolie des enfants que l’abattement des parents.
Cleo, sa mère, sa tante, ses cousines, mais aussi la bonne et sa fille ainsi que la grand-mère. Toutes ces femmes se retrouvent réunies dans la même maison pour affronter ensemble leur peine. Un rassemblement qui fait aussi de Mamá, mamá, mamá un film très féminin. Découvertes de la puberté pour ces jeunes filles à différents stades de l'adolescence. Drague en mode T-shirt mouillé, cérémonie rituelle autour des premières règles ou discussion autour du premier baiser constituent les préoccupations de ces jeunes filles dont la féminité en mutation reste un sujet central malgré les événements.
Un récit initiatique qui se terminera d'ailleurs par la poursuite d'un lapin blanc, dans une forêt faisant office de pays des merveilles et qui permettra aux différents membres de la famille de se retrouver autant au sens propre que figuré. Une retrouvaille sous le signe de la renaissance et de l'acceptation qui vient clore l'heure de ce premier long métrage, court en temps mais intense en émotions.