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    Les Herbes sèches
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    jerome S.d.c.
    jerome S.d.c.

    25 abonnés 120 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 3 septembre 2023
    On arrive à tenir plus de trois heures sans (trop) s'ennuyer, avec une fresque réussie de destins brisés, thème plutôt porteur actuellement...un peu trop bavard mais bien joué et bien filmé.
    Voyelle19
    Voyelle19

    20 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 15 juillet 2023
    Ceylan le magicien réussit une nouvelle fois à nous éblouir avec ses crépuscules glaciaux au cœur de l'hiver d'Anatolie.
    JB D
    JB D

    8 abonnés 34 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 22 septembre 2023
    Du haut de ses 3h17, le nouveau film de Nuri Bilge Ceylan a l’ampleur d’un grand ouvrage russe - quelque part entre Tchekhov et Dostoïevski. Par sa durée tout d’abord, qui permet l’étirement de la parole et l’étude des caractères, mais aussi par son regard contenu sur des évènements à priori banals et mineurs. Depuis au moins « Winter Sleep », le maître turc a évolué d’une évocation picturale bouleversante (« Nuages de mai », « Uzak » et « Les climats » en particulier) a une matière plus immédiatement littéraire ; à la fois plus retors et plus profonde mais dans laquelle se tiennent debout, encore et toujours, des figures-paysages.

    On rentre dans le cinéma de Ceylan comme dans la difficulté à s’approprier un nouveau récit ; ses films ont le sentiment si particulier des premières pages, des premières lignes, celles où flottent l’incertitude identitaire des personnages et notre difficulté à les cerner. Tout son cinéma semble bâti en ce sens, non parce qu’il se veut cryptique, mais parce que ce qu’il montre des êtres humains s’est perdu dans l’écart des décennies récentes. Chez Ceylan, une personne est autant réelle que fictionnelle ; elle dit quelque chose d’existant chez chacun, mais elle a une individualité propre qui nous sépare d’elle. Les actions, mues par des sentiments qui dépassent le cadre schématique et explicatif, sont parfois dures à saisir : en cela c’est un cinéma qui accorde une profonde relation à l’incertitude et à l’infamiliarité, à la perplexité. Le monde rural tout d’abord, qu’il filme avec une compréhension rare, comme si Ceylan avait grandi partout où il filme : attention si particulière aux horizons et à l’inscription de l’homme dans une Nature puissante, fondamentale dans la compréhension de la mécanique sociale. Et cette société des hommes qui s’inscrit dans cet horizon puissamment désespéré ; on y comprend ô combien il est dur de vouloir en sortir, de vouloir devenir quelqu’un. Ainsi « Les herbes sèches » est la réflexion de l’homme éternellement inaccompli.

    C’est une oeuvre monumentale, d’une durée nécessaire pour montrer comment un glissement peut opérer, si petit soit-il, dans la certitude des hommes. La beauté du film tient d’ailleurs dans la dimension révélatrice des personnages féminins : la mise à mal des idéaux socio-politiques, la mise en doute des croyances, l’ouverture au désir. Une séquence magnifique de tête-à-tête fait basculer le film dans une dimension presque onirique, repoussant l’idée du film à thèse vers le véritable sujet qui le traverse parmi tant d’autres : la désillusion.
    Ceylan traite comme souvent la micro-société comme un échantillon des maux du monde : la difficulté ontologique de séparer le corps de l’esprit (en témoigne un étonnant plan-séquence dans les coulisses du tournage), la perte des idéaux, l’inévitable mouvement intérieur qui nous pousse à nous grandir vers un monde meilleur, et la possibilité de vivre dans la croyance qu’il le soit. C’est aussi l’école comme premier lieu social, la corruption spirituelle, l’homme et la nature, l’homme et sa nature.

    Il est compliqué d’évoquer un cinéma aussi riche et intellectuel, sinon qu’il réussit le miracle de donner à voir l’ouverture vers le coeur. Samet est en cela un personnage « à la russe » parce qu’il a la profondeur du type rude, ouvertement détestable, confit dans une complaisance intellectuelle d’une grande arrogance - et dont l’intériorité fonctionne comme un mystère qu’il faut percer. Fonctionnaire frustré de ne pas être un lettré du monde, Samet enseigne dans une petite école perdue au sein de laquelle il professe avec l’ignorance que peut avoir l’impact d’un adulte sur un enfant. Au sein de ce monde fermé, désabusé, où tout le monde tente de vivre à la fois les mouvements météorologiques et les petits jeux de pouvoirs, Samet fait la rencontre d’une intrigante femme rescapée d’une attaque terroriste (Merve Dizdar, magnifique Prix d’interprétation féminine à Cannes). La rencontre n’a d’ailleurs pas lieu comme source de désir mais par l’imbrication d’un jeu de manipulation entre son collègue et elle, et qu’il va renverser à son avantage. La solitude masculine se mue non pas en idylle, mais en étude de personnages autour desquels se noue un second récit, qui est celui de l’accusation d’une jeune élève contre Samet, élevant le récit à une question plus contemporaine : le rapport d’emprise et l’ambiguïté d’un enseignant qui se pense accusé à tort.

    On reproche de nouveau à Ceylan sa misanthropie, alors que toute la subtilité du film est de montrer les nuances de la situation, l’ambiguïté évidente de Samet (qui probablement ne pense pas à mal), et l’attitude étrange de la petite fille, dostoievskienne au possible (le rire forcé comme mouvement nerveux du charme) ; le désespoir d’une vie rude, l’enneigement progressif de l’image, la difficulté à se tenir debout dans le monde reculé, les adultes qui savent et les enfants qui ne savent pas encore. Mais qu’est-ce donc de misanthrope là-dedans? Ceylan, au contraire, a la puissance du romancier qui sait donner du sens entre les lignes, qui sait composer des sentiments réels, parfois opaques, et qui ne sont jamais des « trucs » scénaristiques. Il dit avec force l’archaïque système éducatif de ces régions reculées, oubliées, jamais contées. Il parle de la frustration des intellectuels mais aussi de l’espoir d’une vie meilleure, et surtout, en embrassant le point de vue nuancé d’un personnage à priori abject, il veut donner à voir le germe d’une pensée nouvelle : n’y a-t’il pas plus beau que de prendre plus de 3h pour n’arriver qu’à un infime changement, à la compréhension d’un mal qui a été fait? N’est-ce pas la réalité des hommes que d’essayer de percer les nuages, et de substituer à la perversion le sentiment de résilience, de résistance ?

    Comme certains auteurs accusés de sérieux (Mungiu, Roustaee…), on ne regarde pas assez bien, et d’assez près, le cinéma de Ceylan et le génie de sa mise en scène, qui n’est pas qu’une question de beauté picturale. Ce qui est beau avant tout, c’est de voir que la caméra est toujours placée du côté de la classe, du côté des élèves ; elle n’apparaît qu’à deux courts moments du point de vue du professeur. Et le cinéma, ne l’oublions pas, c’est aussi cela : savoir de quel côté se tient la caméra, et donc de qui elle se fait le porte-paroles. « Les herbes sèches » est de ces films qui s’inscrivent dans un regard éthique du cinéma : que les dernières images donnent à Samet le recul d’observer, seul en haut d’un sommet rocailleux, le contrebas desséché par le soleil d’été, montre la prise de hauteur du personnage face à ses erreurs. Et la petite fille, qui revient alors comme un souvenir ardent, riant dans la neige lors d’un plan d’une beauté à vous émouvoir aux larmes, est bien celle qui clôture le film : la promesse incertaine d’un avenir de l’autre côté de la plaine, là où ont été percés les nuages.
    Flocon
    Flocon

    7 abonnés 131 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 18 juillet 2023
    On passe de magnifiques images de paysages quasi déserts aux atmosphères étouffées où les personnages progressent difficilement, comme dans leur existence, à des scènes verbeuses où chacun tente de donner un sens à sa place dans le petit microcosme rural en fonction des contraintes qu'il subit.
    Si l'atmosphère et les interprètes sont excellents, une certaine longueur s'installe et une scène déstabilise : spoiler: la sortie du personnage principal du récit, que l'on suit sur le plateau de tournage, avant qu'il n'y revienne... dans le récit
    . Ce type d'artifice n'a guère de sens, on suit aussi trop de personnages, qui finalement disparaissent sans que l'on sache où. Le réalisateur abandonne trop ses spectateurs au bord du chemin pour que l'ensemble soit inoubliable.
    FaRem
    FaRem

    8 670 abonnés 9 541 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 11 mars 2024
    Nouveau long-métrage de Nuri Bilge Ceylan, "Kuru Otlar Üstüne", en version originale, est une œuvre à la fois philosophique, sociale, psychologique et politique. Une étude de caractère complexe, nuancée et saisissante au sein d'un village isolé qui vit au rythme de deux saisons. Pendant la quasi-totalité du film, nous sommes plongés dans un hiver long et rigoureux qui use les gens. Samet veut échapper à cette vie morose et se faire muter à Istanbul, mais en attendant, il profite de sa popularité auprès de ses élèves jusqu'à un certain incident... Le réalisateur s'interroge sur le comportement humain et sur ce qui pousse les gens à agir à travers le portrait et les agissements d'un homme mesquin, égoïste et égocentrique. Plus que ça, c'est une plongée dans les pensées des personnages grâce à de fantastiques séquences avec des échanges intenses et profonds mettant en avant les idées, la complexité, l'espoir et le désespoir de ces gens. C'est remarquablement mis en scène, parfaitement incarné par l'ensemble du casting et fascinant de bout en bout. En somme, un grand film de trois heures que l'on ne voit pas passer.
    weihnachtsmann
    weihnachtsmann

    1 154 abonnés 5 140 critiques Suivre son activité

    2,5
    Publiée le 15 mars 2024
    On quitte le domaine du contemplatif auquel nous étions habitués pour s’immiscer dans une école où la parole s’étale vraiment beaucoup trop. La longueur interminable ne se justifie en rien dans cette histoire d’accusation sous forme de vengeance.
    C’est assez moyen et c’est trop bavard.
    elriad
    elriad

    435 abonnés 1 860 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 28 février 2024
    Porté par un trio d'acteurs d'une justesse impressionnante malgré des scènes longues truffées de dialogues ( Merve Dizdar a été récompensée à juste titre par un prix d'interprétation à Cannes) la durée du film se fait hélas ressentir quand l'excellent "Winter Sleep" récompensé d'une palme d'or et d'une durée équivalente, lui, ne pesait pas par sa durée. Le personnage central, nihiliste et peu sympathique est l'élément central d'un film bavard trop conceptualisé, se perdant en route à force de vouloir aborder trop de sujets. L'ennui finit par prendre le dessus.
    tuco-ramirez
    tuco-ramirez

    134 abonnés 1 626 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 7 février 2024
    Abonné à Cannes mais aussi de mes séances ciné, un Nuri Bilge Ceylan mérite toujours de se caler une demi-journée ciné. Là, il ne déroge pas à son style : un film fleuve de 3h20, très bavard et au cœur de la Cappadoce enneigée et reculée. Une des grandes qualités du maitre turc est de filmer avec une grande élégance les coins paumés de son pays. L’autre qualité est de nous montrer les intellectuels y vivant, englués dans ces territoires sans avenir ni perspective. Le tout donne des échanges entre les protagonistes dont certains de très grande volée ; donc sa qualité ultime est l’écriture des dialogues. Ils sont tellement riches qu’il faudrait couper le film en deux ou le voir très vite une seconde fois. Celui-ci par contre pêche par son scénario. Les histoires humaines ne s’imbriquent guère et l’unité du film en pâti ; par exemple le fil rouge autour de la relation entre la jeune fille et le professeur d’art plastique fonctionne peu.
    Par contre, dans « Winter Sleep », il avait atteint le graal ; jamais on n’avait filmé aussi bien un hiver interminable et les batailles dialectiques au coin du feu qui l’accompagne. Ici, cette même idée fait naitre des sentiments moins forts.
    Parti bredouille de Cannes, celui-ci et d’autres prouvent que la sélection 2023 était de qualité. Il faut cependant être bien armé pour se confronté à 3h20 de langueur monotone et intellectuel en langue turc.
    TOUT-UN-CINEMA.BLOGSPOT.COM
    Juan 75
    Juan 75

    60 abonnés 369 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 30 juillet 2023
    Le talent de Ceylan se confirme. La longueur du film sert le sujet ainsi que les paysages, qui reflètent le désespoir du héros, sa complexité, son aridité, sa perversité et aussi sa sauvagerie. Sans doute Ceylan y a-t-il mis de lui-même. L'acteur aurait mérité le prix d'interprétation. Le scénario et la réalisation sont magnifiques. Les personnages se croisent sans vraiment se rencontrer vers un dénouement inexorable. Sans doute une métaphore de la vie.
    kingbee49
    kingbee49

    38 abonnés 608 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 13 août 2023
    La chronique existentielle d'un prof dans la Turquie rurale.... C'est très bien écrit, tellement qu'on fini parfois par ne plus croire ce qui sort de la bouche de certains personnages, notamment la jeune Sevim... Et ça digresse intellectuellement sur les choses de la vie, ça se morfond, ça s'ennuie... A un, à deux, à trois, à quatre... Dans le premier tiers du film, on croit partir sur un drame puis on repart sur les digressions existentielles, entre deux remplissages de bouteilles d'eau de source... Le personnage de Naray est très touchant mais dieu que son bavardage avec Samet est long ! A la fin, on est quasiment dans "Jules et Jim", d'ailleurs. Ceylan sublime ses personnages dans leur désarroi, leur vision du monde et leur rapport aux autres mais il en fait un matériau contemplatif beaucoup trop gros. Du coup, sur les trois heures, il pouvait en retrancher une voire au moins 45 minutes. Sinon, on retrouve formellement chez lui les gimmicks du cinéma de Tarkovski : longs plans séquences, panoramiques épurés... Mais transcendé ici par une photo magnifique. Au final, "Les herbes sèches" est un singulier voyage intérieur qui peut fasciner ou ennuyer.
    Fenêtre sur salle
    Fenêtre sur salle

    67 abonnés 213 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 25 juillet 2023
    Ma page ciné insta : fenetre_sur_salle

    Les Herbes Sèches est un film exigeant du fait de sa longueur, mais aussi de l'âpreté de ses paysages et de la vie de ses personnages ainsi que de ses longues scènes de dialogues, dont il faut souligner la qualité et la finesse d'écriture.

    La complexité des personnages est également à mettre en avant, notamment celle du personnage principal, génial anti-héros pour lequel on se plaît à se demander tout le long du film s'il faut l'aimer ou le détester. Le personnage féminin, pour laquelle l'actrice a gagné un prix d'interprétation au dernier Festival de Cannes, fait preuve d'un engagement et de convictions qui forcent l'admiration. Enfin, le performance de la jeune adolescente est à mettre en avant, dégageant, là encore, beaucoup de complexité et d'ambiguïté.

    La mise en scène est impressionnante de précision et de rigueur. La caméra ne bouge pas forcément beaucoup mais elle semble toujours positionnée à l'endroit le plus pertinent pour rendre compte des intentions du réalisateur. L'insertion des très belles photographies qu'il a lui-même prises est également très réussie et apporte au film, très bavard, cette touche d'émotion qui pourrait lui manquer par ailleurs, tout comme la séquence finale, qui développe un lyrisme inattendu.

    Enfin que dire de cette séquence, géniale, sidérante, dont on se demande si elle a vraiment existé tant elle est audacieuse et qui, à l'instar du Club Silenzio de David Lynch, fait basculer le film dans une toute autre sphère d'analyse, indiquant au spectateur que ce qu'il voit ne correspond pas autant à la réalité que ce que sa réalisation quasi naturaliste pourrait laisser paraître.

    En résumé, un film qui, je pense, aurait pu repartir avec n'importe quel autre prix du Festival, tant il est riche et travaillé.
    Loïck G.
    Loïck G.

    337 abonnés 1 672 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 28 avril 2024
    3.5 sur la première partie, l'ensemble à 3
    Il est quand même difficile d’appréhender ce genre de film qui sur la longueur ( 3 heures ) ne tient pas les rênes d’un scénario bavard et à la longue un peu confus. Il est question d’une amitié entre deux professeurs qui va s’émousser en raison d’une affaire litigieuse au sein de leur établissement. Le regard sur les relations entre les deux hommes, lié à celui d’une éducation scolaire me parait le plus intéressant dans ce récit dont l’esprit s’échappe complètement lorsqu’il est question d’un triangle amoureux. A l’origine le réalisateur semblait partir sur les rapports hiérarchiques dévoyés vers une oligarchie sans fondement. L’attitude du principal et du recteur ne manquent pas d’à-propos au moment d’exposer les faits reprochés aux deux hommes. Mais ce n’est qu’une parenthèse pour disséquer ensuite l’âme humaine , ses travers, ses contradictions, jusqu’à la confusion des sentiments dans ce trio qui parait se perdre lui-même à force de logorrhée intempestive. La jeune femme qui dévie la trajectoire du film , s’empare d’une distinction cannoise, un peu surprenante, et nous laisse sur l’attente d’un dénouement tout autre. Trois heures plus tard …
    Pour en savoir plus : lheuredelasortie.com
    rvrichou
    rvrichou

    101 abonnés 426 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 7 août 2023
    Un film musclé politiquement, philosophiquement et esthétiquement. Deux histoires dont on ne voit pas bien le rapport sauf au prix d une analyse poussée mais deux histoires aussi intéressantes l une que l autre. Des images sublimes et des personnages remarquables.
    guifed
    guifed

    64 abonnés 286 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 4 octobre 2023
    Une voiture dépose un homme au bord d'un chemin de terre qui mène à un petit village. Autour, rien que le manteau infini de la neige, le bruit du vent et la silhouette des montagnes au loin. L'homme avance difficilement jusqu'à l'entrée d'une petite maison, dont l'intérieur semble seulement éclairé à la bougie.


    Le film a commencé il y a cinq minutes mais on sait déjà qu'on est chez Nuri Belge Ceylan. Son cinéma est comme ce vieillard chez qui il fait bon vivre, qui nous raconte encore et toujours la même histoire au coin du feu : l'Anatolie, la ruralité, l'isolement, de la communauté, et peut-être plus que tout, de l'homme et de la nature, ou de la nature de l'homme, ou de l'homme face à la nature, ou des trois à la fois, on ne sait plus trop. C'est un vieillard brillant, érudit, lucide sur ses propres défauts jusqu'à parfois s'autoflageller, lui et sa condition d'intellectuel coupé du monde. C'est un vieillard qui raconte la même histoire sans jamais vraiment se répéter, comme dans le fabuleux triptyque de ses trois derniers films : Winter Sleep, le Poirier Sauvage et les Herbes Sèches.


    Cette fois, on suit l'histoire de Samet, professeur d'arts plastiques dans un collège de l'Anatolie profonde. Samet est un personnage tout aussi antipathique que celui de Winter Sleep ou du Poirier Sauvage : il cultive des rapports très ambigus avec ses élèves, particulièrement les filles, spoiler: et ce malgré une explication finale magistrale qui ne le dédouane pas pour autant.
    Face au gouffre tragique de ce paysage qui passe sans transition du gel aux herbes sèches, face aux hommes qui en vieillissant perdent le goût de l'émerveillement et du sentiment brut, qui comme lui deviennent de plus en plus aigris et orgueilleux - spoiler: n'était-ce pas seulement de l'orgueil, cette idylle soudaine avec Nuray, après que celle-ci lui ait préféré son ami ?
    -, face à lui-même, il s'est senti comme une herbe sèche. Il trouvait en Sevim, son élève, une lumière salvatrice, une énergie sans laquelle il n'aurait pas survécu à l'âpreté de cette Anatolie qu'il aimerait tant fuir - il ne cesse de le clamer - mais qui s'avère en réalité une prison dorée. Partir, c'est se remettre en question, c'est bouleverser son univers fait de réflexion et d'attente. Partir, c'est agir, et comme Aydin dans Winter Sleep, ce n'est pas trop son truc. spoiler: La scène du repas est d'ailleurs celle d'un affrontement entre l'activisme de Nuray et l'intellectualisme de Samet. Change-t-on le monde en réfléchissant ou en agissant ? Le champ-contrechamp régulier, qui dure à peu près 5 minutes, est soudain brisé par un plan d'une infinie beauté, lors duquel la caméra plonge derrière la tête de Nuray et accentue cette impression de submersion : Samet ne fait pas le poids face à la noblesse et à la sincérité de Nuray. Ceylan tranche magnifiquement en faveur de ceux qui agissent, et donc en sa défaveur. Il se permet même une fantaisie complètement inattendue avec une mise en abîme momentanée : Samet sort de l'appartement de Nuray pour se regarder, en tant qu'acteur, dans un miroir. Le personnage se sent-il tellement faux qu'il en redevient acteur, que sa vie devient, l'espace d'un instant, l'équivalent d'un plateau de tournage ?


    Les herbes sèches est un très grand film sur le temps qui passe et sur l'âme humaine, comme l'avait été Winter Sleep. Digne d'une Palme d'Or, comme l'avait été Winter Sleep.
    janus72
    janus72

    48 abonnés 269 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 14 juin 2024
    Excellent & à voir en prenant son temps comdab et comme il faut 100 caractère et que j' ai juste envie de NOTER ce Film, je vais donc me Répéter : Excellent & à voir
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