1999, Édouard Joubeaud, se rend pour la première fois à Madagascar. Début d’une longue relation avec cette île-continent, devenue, au fil du temps, un pays de cœur. Il apprend le malgache, étudie l’histoire du pays, y rencontre un vivier d’artistes et y mène des initiatives pour les Nations unies. En 2010, en mission dans le Sud de l’île, il fait la rencontre de Remanindry, musicien-danseur tandroy de renommée internationale, connu pour ses musiques chamaniques transposées des cultes de possession à la scène. De la fascination à l’amitié, les deux hommes lient au fil des ans une relation de confiance jusque dans les sphères familiales devenues alors le berceau d’inspiration du film. Haingosoa se profile en 2015 : Édouard voit en Haingo, fille cadette de Remanindry, le rôle principal de son premier long métrage. De sa complicité avec cette jeune mère malgache se dessinent les contours d’une histoire où le réel invite l’imaginaire à panser un quotidien parfois éprouvant et rendre possible ce désir, si personnel à Haingo en l’occurrence, de vie meilleure.
Haingosoa s’inscrit dans cette mixité fictionnelle et documentaire, à l’image du cinéma de JeanCharles Hue (Mange tes morts, tu ne diras point, 2014, La BM du Seigneur, 2010) qui suit depuis plus de dix ans une communauté des gens du voyage. Une approche basée sur la fascination d’une communauté, de personnalités fortes au destin fragile, fleurtant souvent avec l’imprévisible et le risque.
Le film réunit plusieurs générations de compositeurs et de musiciens malgaches. Remanindry, père d’Haingo, incarne la musique de l’Androy, région aride du Sud de l’île, tandis que la Compagnie RandriaErnest de Tananarive représente à sa façon la danse et la musique des hautes terres d’aujourd’hui. Dadagaby, l’un des compositeurs du film, est quant à lui un monument de la musique malgache. Il est l’auteur de dizaines de chansons splendides connues de tous les Malgaches telles que Ny Voninavoko, Mananjary ou Iza Ireo. Décédé en 2018, pendant le tournage, il a été pour Édouard Joubeaud pendant plus de dix ans une source intarissable d’émerveillement, d’inspiration et de poésie - le film lui est d’ailleurs dédié. La jeune Voara, enfant prodige, reprend deux de ses chansons : Sahondra (accompagnée dans le film par son père à la guitare) et Mananjary. Voara et le groupe PRAL incarnent la jeune génération et apportent, chacun à leur manière, de la grâce à la narration.