En connaissance de cause, je n'attendais absolument rien de ce film et je m'étais évidemment préparé à la rupture esthétique telle qu'elle avait été annoncée au préalable: je trouve simplement dommage que si peu de gens aient effectués cette démarche, pourtant nécessaire à une appréciation plus juste du film.
Il était en effet complètement insensé d'espérer voir un rapprochement quelconque avec les anciens films du studio, si ce n'est aimer s'engouffrer dans une désillusion attendue et chercher à se frustrer pour ensuite dire "c'était la faute du film".
"Aya et la sorcière" n'est peut-être pas un chef-d'œuvre pouvant prétendre au même statut que les films précédent du studio Ghibli, loin de là, mais il reçoit à mon sens bien trop de mauvaises critiques qui reflètent très bien cet état d'esprit comparatiste et, dans ce contexte, totalement impertinent et hors-de-propos. Si vous cherchiez désespérément un nouveau "Princesse Mononoké" ou que sais-je, comment voulez-vous ne pas être déçu ? Bien que ce film souffre de nombreuses imperfections, qui sont d'ailleurs davantage portées sur le plan scénaristique et narratif que sur l'animation en elle-même qui fut quasiment d'emblée contestée (presque "expérimentale" par moment, contenant quelques bizarreries toutefois acceptables pour une première fois), c'est décidément le manque d'ouverture d'esprit des spectateurs qui semble achever le nouveau défi que s'était humblement imposé Goro Miyazaki.
Je me suis pour ma part assez bien accoutumé à cette nouvelle animation en 3Dimension, m'amusant même à retranscrire sur un maximum de plans l'équivalent en animation plus "classique" avec une certaine aisance, ce qui m'a conforté dans l'idée que le film ne s'était pas tant éloigné que ça de "l'esprit Ghibli" (sinon cela m'aurait été impossible, croyez-moi).
Je redoutais que les décors soient vides, choses qui m'aurait été insupportable, mais ce fut dans l'ensemble suffisant pour maintenir une atmosphère crédible et immersive. Je trouve que les critiques sont d'ailleurs bien sévères à l'égard de l'animation et du décor, allant jusqu'à parler de "laideur", chose qui me parait complètement exagéré: j'admets qu'il y'a encore du progrès à faire mais de là à parler de "laideur"... J'aurais compris s'il aurait s'agit d'une unité disharmonieuse, mais ça n'est absolument pas le cas.
J'aimerais également réserver un sort spécial à la bande-son qui, comme à l'image de l'animation, est très atypique mais globalement réussi. On s'éloigne bien évidemment des OST sublimes de Joe Hisaishi pour s'approcher d'un univers musical plus "contemporain", s'efforçant de retranscrire l'atmosphère dans lequel le film s'inscrit. Les liens établit entre les personnages et les musiques sont vraiment essentiels, et forment un plus à prendre en compte: tout ce rapport entre le monde musical et les protagonistes forge une identité singulière et poétique, comptant parmi les meilleures scènes du film. C'est dommage que ce potentiel n'ai pas été davantage exploité.
Pour synthétiser, j'ai trouvé ce télé-film très sympathique et relativement sensible à certaines exigences du studio, quoi qu'on ait pu en dire. Néanmoins, il est regrettable d'assister à ces vides scénaristiques béant qui auraient pu porter le film et ses personnages bien au-delà de ce qu'ils sont, et marquer davantage les esprits. Je suis profondément imprégné par les anciens films, l'origine même de ma passion pour le cinéma, et préférerai mille fois revoir les procédés traditionnels, mais je m'efforce d'accueillir cet élan naissant qui mérite qu'on s'y intéresse, et j'espère sincèrement que ce film aura permis la venue de futurs chef-d'oeuvre. J'ai bon espoir, Goro Miyazaki a tout mon insignifiant soutien.