Petite Fleur est un film insaisissable. D'abord par son excellent démarrage qui verse dans la comédie de meurtre fantastique (le voisin qui
se fait trucider tous les jours, et revient comme si de rien n'était le lendemain,
sans qu'on ne sache jamais comment ce prodige a lieu), avant de devenir complètement foutraque, navigant à vue dans un concept qu'il n'exploite finalement que très peu (exit le fantastique, on se recentre plutôt sur des histoires de couple et la jalousie maladive de l'époux...). Un choix qu'on n'a pas compris, quand on a la chance d'avoir un scénario drôle, original, décalé, et porté par un Melvil Poupaud qui s'éclate à jouer le mec narcissique et imbu de sa personne, dont la tête vole dans les airs chaque jour... La disparition de cet arc narratif au profit d'une classique histoire de vaisselle brisée a été notre déception ultime, ajoutée à celle de n'avoir pas de fin compréhensible (là encore, un choix devant lequel on s'interroge) :
on a saisi que le meurtre représente un exutoire pour cet époux qui gère mal sa situation de père au foyer qui ne sait pas parler français (et dépend donc en tous points de sa femme, qui commence à se lasser...), mais que, ayant abusé de cette catharsis, voici que l'époux devient un jaloux compulsif assez borné. On pourrait penser, à voir la scène dans laquelle il arrête son geste avant de tuer pour la énième fois ce voisin-punching ball, qu'il a enfin compris la leçon et révise son comportement.
Sauf que, si l'on avait trouvé cette fin logique et respectueuse du propos à la Un Jour sans fin, on se prend le dernier plan en pleine face :
les deux époux tuent le voisin.
"Ah... Et pourquoi ?" s'est-on entendu dire, nous laissant apprécier le générique de fin avec un air perdu planté sur le visage. Petite Fleur nous a seulement donné l'impression d'être passé totalement à côté de son potentiel drôlatique et cynique, on rêve maintenant de voir un film qui reprenne l'histoire dingue du voisin, en version décalée et aboutie. Mention tout de même aux acteurs qui s'amusent (surtout Melvil Poupaud en voisin odieux qui mérite son coup de pelle), et à cette si jolie BO de jazz qui nous a rappelée celle de Minuit à Paris (identique... c'était une référence ? Étant aussi une histoire de mari qui s'évade de son quotidien par le biais d'une histoire fantastique... Non ? On continue de ne pas comprendre Petite Fleur). Le démarrage était un bulbe intéressant, le scénariste a juste oublié de l'arroser, dommage.