"Le Temps d'aimer" de Katell Quillévéré est un film qui, à bien des égards, réussit à captiver et à émouvoir, tout en laissant une impression d'inachevé et de potentiel non pleinement exploité. Situé dans la France d'après-guerre de 1947, le film tisse l'histoire complexe de Madeleine, une femme marquée par son passé, et de François, un jeune étudiant mystérieux. Leur rencontre sur la côte bretonne devient le théâtre d'une romance aussi délicate que tumultueuse, portée par des performances captivantes d'Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste.
La réalisation de Quillévéré brille par sa capacité à reconstituer avec soin l'époque d'après-guerre, grâce à un travail remarquable sur les décors de Florian Sanson et les costumes de Rachèle Raoult. La photographie de Tom Harari parvient à capturer la beauté mélancolique des paysages bretons, conférant au film une atmosphère envoûtante. La musique d'Amine Bouhafa, mêlant des morceaux d'époque à une composition originale, enrichit l'ambiance du film, soulignant les moments clés de l'intrigue avec justesse.
Cependant, le film peine à maintenir un équilibre entre la richesse de son contexte historique et le développement de ses personnages principaux. Bien que le scénario, coécrit par Quillévéré et Gilles Taurand, propose des thèmes profonds comme le secret, la honte, l'amour et la sexualité, il semble par moments que le film effleure seulement la surface de ces questions complexes, sans plonger dans la profondeur émotionnelle que l'histoire suggère.
L'un des défis du film est sa gestion du rythme. Avec une durée de 125 minutes, certaines séquences semblent étirées, tandis que d'autres moments clés auraient mérité davantage de développement pour renforcer l'impact émotionnel sur le spectateur. Le montage de Jean-Baptiste Morin aurait pu être plus serré pour donner au film un élan plus constant et une direction plus claire.
En outre, bien que le film bénéficie d'une distribution talentueuse, certains personnages secondaires manquent de profondeur et leur relation avec les protagonistes n'est pas toujours convaincante. Cela crée par moments un sentiment de déconnexion, où l'investissement émotionnel du spectateur est mis à l'épreuve.
Malgré ces réserves, "Le Temps d'aimer" reste une œuvre cinématographique notable, riche en atmosphère et portée par des performances d'acteurs impressionnantes. C'est un film qui, malgré ses imperfections, parvient à évoquer une époque révolue et à raconter une histoire d'amour qui défie les conventions sociales et personnelles. Sa présence dans des festivals tels que Cannes et sa réception critique mitigée reflètent un film qui, bien que ne réalisant pas pleinement son potentiel, reste une contribution valable au cinéma français contemporain.