Famille, je vous hais !
Le nouveau film de Maïwenn faisait partie de la Sélection Officielle Cannes 2020. Neige, divorcée et mère de trois enfants, rend régulièrement visite à Émir, son grand-père algérien qui vit désormais en maison de retraite. Elle adore et admire ce pilier de la famille, qui l’a élevée et surtout protégée de la toxicité de ses parents. Les rapports entre les nombreux membres de la famille sont compliqués et les rancœurs nombreuses... Heureusement Neige peut compter sur le soutien et l’humour de François, son ex. La mort du grand-père va déclencher une tempête familiale et une profonde crise identitaire chez Neige. Dès lors elle va vouloir comprendre et connaître son ADN. Désireuse de parler de transmission et d'origines, elle affirme avoir voulu faire avant tout un film CONTRE le racisme et POUR les immigrés, peu importe de quelle génération ou de quelle origine géographique. Ambition tout à fait honorable et conviction assurée. Reste la forme qui pêche un tantinet durant ses 90 minutes qui peinent à répondre à la question cruciale : d’où viens-je ?
On est très vite submergé par la tempête familiale où l’on a bien des difficultés à reconstituer les liens entre les différents personnages, bref à savoir qui est qui. On est constamment brinquebalé de crise d’hystérie en crise d’hystérie… et dans l’ensemble, c’est épuisant. Un seul personnage – celui de l’ex de l’héroïne -, apporte un peu de calme, de recul et d’humour à cette énorme dose de pathos et d’émotions larmoyantes. Comme on a du mal à entrer en empathie avec des personnages qu’on ne comprend pas vraiment, l’heure et demie peut paraître très longue à certains, dont j’étais. Tout ce petit monde braillard, souvent odieux – entre autres avec le personnel de l’EHPAD -, frisant le ridicule devant l’employée des pompes funèbres totalement ahurie par cette famille de dingues qui se donnent en spectacle sans la moindre pudeur, devient vite insupportable jusqu’à cette espèce d « ego-trip » où Maïwenn s’offre un shooting dans les rues d’une Alger la Blanche de carte postale. Bref, vous avez compris, je n’ai pas marché, malgré quelques moments poétiques et quelques autres savoureux, l’ennui gagne un spectateur qui ne se sent absolument pas impliqué par un film qui ne répond pas à la question liminaire : d’où viens-je ? Par contre à l’autre question importante : où vais-je ? Je sais, je rentre chez moi.
Maïwenn est donc partout, à l’écriture, derrière et devant la caméra. Une somme écrasante loin d’être assumée. Fanny Ardant réussit toujours à merveille dans le rôle de celle qu’on adore détester. Mais là, elle en fait des tonnes. Marine Vacht est, comme souvent, transparente. Par contre j’ai beaucoup aimé retrouver le trop rare Alain Françon, Omar Marwan, très touchant et Louis Garrel, irrésistible de drôlerie sauverait presque le film si son rôle n’avait été aussi limité. Paradoxalement, ce film qui s’attaque à une question universelle, celle des origines, ne parvient pas à tous nous emporter avec lui en passant à côté de son sujet, car trop artificiel, stéréotypé voire exhibitionniste. Dommage, j’aurais tant voulu aimer ce film.