La progression narrative de County Lines semble familière : un adolescent difficile, une famille monoparentale, le manque d'argent, l'inéluctable descente vers la déchéance ... Oui, mais voilà, s'il est un héritier naturel du cinéma social britannique, Henry Blake, primo-réalisateur, peut se targuer de plus de 10 ans d'expérience auprès de mineurs en rupture de ban avec la société. Et cette connaissance irrigue naturellement County Lines, lui conférant une authenticité rugueuse, parfois à la limite du sordide, il faut bien le dire. Le seul reproche éventuel à faire au film est parfois un manque de fluidité et des transitions un peu brutales, mais pour le reste il témoigne d'une maîtrise remarquable pour un premier long-métrage, tant dans sa progression dramatique que dans sa mise en scène, sobre mais efficace et surtout sa direction d'acteurs, notamment avec le jeune Conrad Kahn qui incarne le rôle principal avec un mélange subtil de puissance, d'introspection et de vulnérabilité. Avec lui et la formidable Ashley Madekwe, County Lines aborde magnifiquement une relation mère/fils qui, tant dans les conflits violents que dans les instants de tendresse, constitue un peu le cœur battant du film, avec un pic d'émotion précieuse car longtemps refoulée, en guise de note finale.