La grande évasion… par le chant
Son biopic sur Django Reinhardt de 2016 n’était pas passé inaperçu. Etienne Comar récidive pour se 2ème film en choisissant à nouveau une thématique musicale. Luc est un chanteur lyrique renommé. En pleine crise personnelle, il accepte d’animer un atelier de chant dans un centre de détention pour femmes. Il se trouve vite confronté aux tempéraments difficiles des détenues. Entre bonne conscience et quête personnelle, Luc va alors tenter d’offrir à ces femmes un semblant de liberté. 106 minutes qui constituent une des belles surprises du moment. Un film dramatique sorti quasiment sans promo, presqu ‘en douce, mais qui tient ses promesses avec un sujet fort et un casting à la hauteur. A voir !
Tout est ici construit comme une œuvre musicale, choix du tempo, les contrastes, les voix, les niveaux d’émotion ou d’intensité, l’ouverture et coda… c’est brillant. Un film qui montre à quel point le chant peut être une libération. Et quoi de mieux qu’une prison pour exprimer la métaphore de cette libération… Je sais, les pisse-froid habituels vont nous dire que le sujet est rabâché. Après l’excellent Un Triomphe – avec le non moins excellent Kad Mérad -, où c’était à travers le théâtre que la métamorphose s’opérait chez des prisonniers – sans remonter au César doit mourir des Frères Taviani en 2012, on reprend le même thème et on recommence. L’utilisation du format 1.33 se justifie car c’est celui qui traduit le mieux l’enfermement de ses femmes et qui permet de filmer au plus près ce concentré d’humanité à la fois marginal et minoritaire, mais qui devient vite central et universel. Les lumières et les couleurs sont également soigneusement choisies avec les scènes de prison très lumineuses et, a contrario, les moments d’extérieur avec le héros, où cette fois, les teintes sombres et denses prédominent. Je le répète, un film plus subtil qu’il n’y paraît, avec une technique et une distribution entièrement au service d’un projet somme toute ambitieux et qui touche juste.
Alex Lutz, de film en film, confirme qu’il est un comédien très fin et sobre. Encore une belle performance. Les « prisonnières », Agnès Jaoui, Hafsia Herzi, Veerle Baetens, Marie Berto, ainsi que deux non-professionnelles, Fatima Berriah et Anna Najder, lui donnent une réplique épatante bourrée de sensibilité et de talent. La musique avec toutes ses vertus de solidarité, de tolérance, d’épanouissement, de joie, de compassion et d’amitié… un beau programme pour un bien joli film très touchant. La grande évasion… par le chant, qui confirme que seule, la beauté la grisaille de la vie.