Voici une comédie du début des années 30, qui aurait pu être sympathique compte tenu de son concept, mais qui au final s’avère tout de même décevante.
D’abord sur la forme on est proche du désastre. Mise en scène inexistante, tout en plan fixe, à mi-distance des personnages, aspect théâtral continuel avec aucun extérieur, sachant que les intérieurs ne sont pas non plus d’un grand soin, trop dépouillés qu’ils sont. Le métrage n’a franchement pas de relief visuellement, il n’y a pas d’efforts de fait, c’est du théâtre filmé tout simplement, et le générique qui se présente comme un livret de théâtre le laissait suggérer. La présence de Marc Allégret au générique justement, cinéaste franchement moyen, ne me surprend guère d’ailleurs.
Si le film est donc décevant sur la forme, avec une musique peu enthousiasmante aussi , il se rattrape heureusement en partie sur ses acteurs. De très bons seconds rôles, notamment une Suzanne Dantès qui rend délicieusement piquante la première partie du film, et un Paul Pauley au personnage détestable à souhait, et des premiers rôles de qualité, interprété par de solides comédiens à la hauteur de l’enjeu. Raimu, Pauline Carton, André Alerme, voilà quelques noms qui parleront aux amateurs de films anciens, et ils tiennent bien leurs personnages, évitant, eux, à peu près l’écueil théâtralisant. A noter la petite présence de Fernandel, lequel n’a ici qu’un tout petit rôle, par le biais de deux scènes.
Le scénario séduira surtout par sa démonstration très aigre des mœurs de la bourgeoisie du temps. Je ne souhaite pas rentrer ici dans les polémiques, je crois simplement que Guitry qui a écrit cette histoire cherchait à rendre compte des mœurs plus ou moins malsaines de ceux qui se jugeaient propres (et l’adultère par colère du début n’en est que le premier chainon). Le film est peut-être une comédie, mais c’est surtout un film très sombre, avec des personnages antipathiques, égoïstes pour la plupart, et la charge est sévère. C’est heureusement ce qui donne un peu de piquant à ce film, car la narration d’une grande platitude, le rythme très mou par moment (malgré un début sur les chapeaux de roue), peuvent facilement amener à décrocher. Le tranchant du propos arrive un peu à maintenir l’attention.
Pour ma part ce film n’a de mérite surtout que pour son propos, photographie aigre de certaines mœurs du temps, et pour son interprétation. Deux éléments qui sauvent ce métrage du désastre, sans toutefois pouvoir pleinement compenser le quelconque total de la forme, et la narration paresseuse. 2