Aborder le sujet de la perte d’un bébé est délicat car il a le devoir d’être complet. La mise en scène de la perte de l’enfant peut paraître longue mais elle a l’avantage de mettre en avant un couple dans un extrême bonheur, dans une intense attente de leur enfant, un couple soudé, amoureux et heureux de la venue de cet enfant. La scène est longue mais elle met aussi en avant le professionnalisme de cette sage-femme douce, à l’écoute et bienveillante tout au long de l’accouchement et qui nous apporte de l’incompréhension lorsqu’on la sent attaquée pour son manque de professionnalisme, pour une injustice qui nous paraît dans cette scène malheureusement naturelle. A titre personnel et en tant qu’homme, ayant vécu également la perte d’un bébé, voici mon avis sur le film. Ce film aborde avec beaucoup de justesse le renfermement d’une femme face à la douleur de la perte de l’enfant, le rejet de tout, le rejet de l’homme avec qui elle a eu cet enfant, le rejet du bébé qu’elle a perdu (Elle souhaite le donner à la science, une façon de s’en débarrasser), le rejet de son entourage incapable de comprendre sa douleur et lui donnant des leçons sur la manière dont elle pourrait l’évacuer, lui mettant la pression pour qu’elle arrête de souffrir car cette souffrance les atteint également. Il aborde avec intérêt la douleur sous-jacente qui ne s’exprime pas directement, qui reste en profondeur, comme cette douleur face aux enfants qu’elle rencontre et qui lui rappelle celui à côté duquel elle est passée. Par contre, grosse déception, comme d’habitude sur ces sujets, concernant le traitement de la douleur de l’homme. cette douleur est réduite à son strict minimum, à des clichés complètement stéréotypés (L’homme qui boit, qui se drogue à la coke, qui essaye de forcer sa femme à avoir un rapport sexuel, qui va la tromper avec sa cousine pour au final l’abandonner avec gros chèque et ne plus revenir). Quand va-t-on enfin aborder sérieusement la douleur d’un homme dans ces situations et arrêter les clichés stéréotypés. Quand va-t-on montrer un homme qui est dans la tristesse de la perte de l’enfant, un homme qui souffre de toutes les projections qu’il a construites, de l’amour qu’il a donné à cet enfant avant qu’il naisse. Meme s’il n’a pas porté cet enfant dans son corps et même s’il ne l’a pas senti physiquement, ne l’a-t-il pas senti émotionnellement, spirituellement comme une âme incarnée déjà présente ? Comment ne pas aborder plus intelligemment la douleur de l’homme face à son impuissance de pourvoir aider sa femme déprimée, renfermée, rejetante, comme s’il était coupable de cet échec. Dans le film, on le fait passer de l’homme bienveillant accompagnant sa femme dans son accouchement à un homme plein de vices qui rend finalement le spectateur moins triste de son départ loin de la femme qu’il a aimé. Au final, on aborde le deuil de cette femme et l’espoir qui renaît avec cette dernière scène qui laisse comprendre qu’elle a eu un nouvel enfant mais qu’en est-il de l’homme ? Comment a-t-il fait son deuil ? Quel est son espoir pour la suite ? J’ai trouvé personnellement ambigu la scène où elle renverse les cendres de son bébé dans la rivière car cela laisse l’impression d’un deuil individuel pour une perte commune, une décision qui lui est propre alors qu’elle se doit d’être partagée avec la personne avec qui l’on a eu cet enfant même s’il y a tout de même la représentation de l'homme avec son bonnet. Cela laisse le sentiment que l’enfant de sa conception à sa perte est une histoire uniquement féminine et que l’homme reste dans un rôle uniquement de géniteur. Doit on accepter cette vision ?