Après avoir vu de nombreuses critiques, j'ai l'impression que beaucoup s'attendaient à un film d'action mêlé à une explosion de violence et de folie ; à un Joker qui se laisse aller dans son monde d'illusions et de meurtres à répétition. On retrouve cependant Arthur Fleck, ancré dans une pure et simple réalité : celle de se confronter aux conséquences de ses actes et de ses troubles mentaux au sein d'un milieu carcéral et pénal qui ne demande que justice.
Il rencontre Lee, qui semble être la seule personne capable de le comprendre et qui lui donne la sensation de ne plus être seul.
Néanmoins, Lee semble aussi être celle qui le pousse et le plonge davantage dans ses vices, à travers des scènes musicales empreintes de mensonges et d'illusions.
Selon moi, il était limpide dès le premier film que ce Joker, dans la peau d'Arthur Fleck, était l'opportunité pour Todd Phillips de soulever les failles d'une société qui, entre autres, n'est pas formée, voire même désireuse, d'accompagner des personnes en situation de détresse mentale. En effet, dans le premier film, Arthur devient le reflet d'une personne qui s'abandonne et se laisse guider par ses idées noires, se disant que c'est peut-être mieux de sombrer dans ses déviances que de tenter d'être finalement aidé par quiconque.
Lee, interprétée par Lady Gaga, est selon moi la personnification même des spectateurs qui attendaient d'Arthur l'abandon de son humanité au profit d'une violence sanguinaire, menée par une soi-disant folie qui, au fond, résulte de la négligence de ses troubles mentaux. Cela se concrétise à la fin du film par la décision de Lee d'abandonner Arthur, après que ce dernier ait admis qu'il n'était pas le Joker fou que tout le monde souhaitait qu'il soit, mais bien un homme ayant commis des crimes.
Pour résumer ma pensée,
le personnage de Lee représente les attentes du public envers Arthur. Les spectateurs espèrent voir Arthur se métamorphoser en Joker, illustrant cette fascination pour le mal et ce fantasme de la folie qui émergent souvent dans la culture populaire. Arthur en vient même à se ridiculiser durant son procès, où il choisit de se défendre et de se représenter seul, devenant une pauvre caricature de lui-même.
En montrant Arthur qui, à la fin, admet ses crimes sans se transformer en une figure héroïque,
Todd Phillips nous confronte, entre autres, à notre échec collectif à reconnaître et à traiter les problèmes de santé mentale, et à trop souvent généraliser les troubles mentaux sous le simple terme de "folie".
Le film peut alors laisser à certains une sensation de frustration, car il ne remplit pas son rôle cathartique : au contraire, il nous confronte à nos propres failles à travers cette fin tragique qui signe la mort d'un "fou" par un autre "fou".
Enfin, il existe de nombreux autres aspects à explorer et à approfondir, au-delà du thème de la santé mentale. Pour certains, le choix d'une comédie musicale est un flop, alors qu'à mon sens, il est introduit tout au long du premier film par les danses du Joker à chaque étape importante de son développement (après ses premiers meurtres dans des toilettes publiques ; lorsqu'il se teint les cheveux en vert ; quand il descend les escaliers dans son costume de Joker ; avant d'entrer sur le plateau de Murray...), ainsi que par le choix des musiques. Néanmoins, je termine ma critique en saluant la direction artistique et le choix de la bande sonore, qui témoignent d'un souci du détail pertinent et qui contribuent à l'affirmation d'un univers visuel unique.