La postérité des studios Aardman a été assurée grâce à leur animation atypique à base de pâte à modeler et à deux personnages géniaux : Wallace et Gromit. C’est pourtant à la sortie de "Chicken Run" qu’ils se sont fait un nom auprès du grand public… ce qui n’est pas forcément justifié au vu de la qualité inégal du film qui s’avère inférieur aux aventures de l’hilarant duo. Certes, sur un plan purement technique, le film s’avère époustouflant et terriblement ingénieux... au point qu’on oublie très vite qu’il s’agit d’animation en pâte à modeler. Le pitch est, également, une idée intéressante et plutôt bien exploitée. Il fallait avoir l’idée, dans un film destiné à un jeune public, de traiter ce poulailler, tout ce qu’il y a de plus classique, comme un camp de prisonniers condamnés à l’abattoir qui vont fomenter un plan pour s’évader, tel Steve McQueen dans "La Grande Evasion" (référence assumée du film). Malheureusement, "Chicken Run" a, à mon sens, le cul entre deux chaises et peine à trouver son ton : trop mature pour un jeune public
(la mort, parfois violente, rôde, qui plus est envers des animaux plus que familiers)
et trop gamin pour un public adulte (les gags font souvent plus sourire que rire). Ce défaut est d’autant plus gênant que, une fois de plus, le précédent "Wallace et Gromit" est forcément dans tous les esprits avec une animation aussi marquée… et les attentes sont, forcément énormes. Or, outre ce problème de ton, j’ai trouvé que le scénario manquait de densité. Dès lors que le film prend le parti de ne pas se limiter à une succession de gags, j’attendais un scénario un peu plus travaillé ou, à tout le moins, plus surprenant. Ce n’est pas vraiment le cas de "Chicken Run" qui a tendance à cumuler pas mal de poncifs tels que
le héros providentiel qui s’avère être un escroc, la chef de meute méfiante qui va se laisser charmer ou, encore, l’évolution classique du difficile entraînement qui commence à donner quelque chose avant que l’espoir retombe pour mieux renaître dans un ultime baroud d’honneur.
Ces thèmes archi-classiques n’empêchent pas "Chicken Run" de se regarder très gentiment mais l’empêche de prétendre au titre de chef d’œuvre qu’il aurait pu être. Car le film ne manque pas de qualité et peut compter sur des personnages aussi atypiques qu’attachants (Rocky le coq flambeur, Ginger la poule révoltée, le vieux colonel acariâtre ressassant ses souvenirs de guerre, l’amusant Monsieur Tweedy...) et sur un casting vocal français de haute volée (Gérard Depardieu, Valérie Lemercier, Josiane Balasko, Claude Piéplu, Henry Guybet…). "Chicken Run" n’est donc pas forcément à la hauteur de mes attentes mais reste un sympathique film dont l’animation lui permet, tout de même, de tirer son épingle du jeu. Et puis, le charme des campagnes anglaises est là…