Tout simplement noir!
Jean-Pascal Zadi, comédien en quête de succès décide d'organiser une grande marche noire, afin de dénoncer la condition des noirs en France. A coups de buzz et de tentatives d'activation de son réseau, il essaie de rallier la communauté à sa cause. Réalisé sous la forme d'un « documenteur », le film nous plonge dans le quotidien de son protagoniste principal, où l'intégralité du casting quatre étoiles joue son propre rôle. A travers ce long métrage, Jean-Pascal Zadi et John Wax veulent traiter de l'état du racisme en France, sur le ton de la comédie. Autant dire que sur le fond autant que sur la forme, l'exercice était délicat et la pente glissante...
Alors pari réussi?
Sur la forme, ça fonctionne, le choix du faux documentaire apporte une certaine authenticité au récit, ce qui permet à tout le monde d'être sans filtre, et d'aller toujours dans le vif du sujet. Tous les acteurs jouent parfaitement le jeu et ne reculent pas devant une auto-dérision parfois corrosive. L'humour est brillant par son écriture et sa maitrise technique. Les auteurs, en fins funambules, alternent avec habileté entre finesse de dialogues, absurde, comique de situation, caricature poussée, humour noir; le tout avec souvent une remarquable maitrise du timing, indispensable à une écriture comique subtile, trop absente des comédies françaises ces dernières années... Les caricatures sont toujours poussées de plus en plus loin, on rit sans s'arrêter, et pourtant, le film sait toujours quand être sérieux, plaçant toujours la bonne réplique au bon moment.
Mais c'est surtout sur le fond que cette comédie se distingue. Son sujet, pourtant menaçant de lourdeur, est maitrisé. Cette comédie se distingue de beaucoup d'autres en France, parce qu'elle ose... Ses thématiques sont abordées avec désinvolture et une certaine acidité outrancière. Au delà de classiquement traiter du racisme en France, Tout simplement noir aborde les thématiques du communautarisme, et braque les projecteurs sur les dérives de certaines visions de l'identité en France. Le film ose dire que oui, encore aujourd'hui, on peut rire des stéréotypes de manière totalement assumée, tout en gardant un message fort et humaniste en fond. La palette de personnages n'épargne personne, du militant victimisé à l'artiste blanc engagé dégueulant des clichés racistes toutes les deux phrases. De bonnes grosses barres de rires pour mettre le spectateur à l'aise avec le sujet, et ainsi marquer la rupture quand, soudainement, une ou deux scènes nous rappellent froidement la réalité; triste miroir, hasard du calendrier, de la brûlante actualité...
le film démonte une à une toutes les cases dans lesquelles les stéréotypes tendent à enfermer tout le monde pour finalement nous laisser en tête un beau message humaniste, enrichi d'une bonne heure et demie de fous rires.
Enfin, d'aucun critiqueront le film sans même oser le voir, craignant une projection trop moralisatrice, une œuvre trop communautaire, trop excluante, où des noirs en victimes se complaisent dans la plainte, Tout simplement noir aura toujours dans ses lignes le contre-argument juste à chacun de leurs propos. A l'arrivée, ne trouveront le film trop moralisateur que ceux dont le miroir caricatural présenté ne sera que trop ressemblant.
Allez dans les salles obscures, et vive le cinéma!