L’éducation passe aussi et surtout par les sentiments. Celui du bien-être s’oppose au mal-être, ce n’est pas une surprise. Pourtant, ils apportent sensiblement quelque chose de réconfortant, si l’on parvient à accepter leur complémentarité. Martin Lund s’en saisit, à l’aide d’une vitalité qui renoue avec la nostalgie ou qui fusionne avec l’actualité, suivant sa tranche d’âge. Il ne nous laisse pas indifférent dans son discours, bien qu’on puisse le rencontrer à tout-va dans divers teen-movies. Mais celui-ci possède une personnalité, qui ne s’embrume pas dans l’outrance ou l’extravagance, pour le simple outil de divertissement. Il y aura toujours quelque chose à explorer dans cette période indécise qu’est l’adolescence. La transition vers la maturité est une étape douloureuse, propre à la dureté d’une époque perdue dans le passé et que l’on ne peut ni rattraper, ni réparer.
Loin de la cruauté qu’évoque le titre, celui-ci met tout de même en évidence un certain traumatisme qui traverse les couloirs des collèges et lycées. Le flux d’élèves n’est que rencontre et collision, un éternel cycle qui ne ralentit que dans les moments les plus intenses. Ceux-ci prennent forme dans le point de vue du groupe, qui aura toujours plus de visibilité sur l’individu, mais pas le dernier mot. Frida (Elli Rhiannon Müller Osbourne), une enclave au système de conduite en Norvège, n’agace pas son monde mais accepte d’être mise de côté afin de tutoyer une liberté que nul ne peut lui offrir. Sa présence est bien évidemment nuancée en profondeur, car ce que le conformiste propose, n’est que superficiel dans le long terme. C’est justement l’arrivée du modèle de réussite et d’admiration qui s’abandonne de plus en plus à ses désirs. Marius (Jonas Tidemann) est doué, bilingue et remplit toutes les tâches qu’on lui tend. Mais il existe une contrepartie qu’il découvre avec beaucoup d’émotions et de stupeur, qu’on le placera au centre de tous les regards, de toutes les attentes et de toutes les confusions.
Le temple de la pédagogie ne livre donc pas toute la sérénité qui devrait l’accompagner, car les mœurs évoluent, tout comme la mentalité des groupes qui bouscule un peu trop la sensibilité. Entre l’amour et la vie sexuelle, la partition reste consciente de ses enchainements, tantôt mélodieux, tantôt maladroits. Lund s’amuse ainsi à regarder ces deux âmes, définies par leur apparence et leur dérive. En parallèle, il ne laisse pas son univers sanglé à la caricature et développe chaque problématique avec honnêteté. Ce que les adultes ignorent se recoupe avec l’expérience passée, qui les agrippe à leur enfant, dont il est difficile de comprendre les pensées, même les plus sombres. Ils sont parents, professeur et médiateur dans cet exercice, mais souvent au service de la normalité, que l’on combat avec la rupture des règles et des conventions. La rébellion est pourtant un des fruits de l’adolescence et on en établit un portrait ludique, sauvage et raccord avec cette émancipation, qui guette chaque détour de conduite.
Ainsi, « Psychobitch » ne manque pas d’être efficace, car nous ramène à l’innocence d’une enfance qui rallie tous les maux d’une société, ponçant tous les contours possibles. Et c’est ce qui est intéressant dans cette nouvelle fable d’école, qui ne sombre pas dans le pessimisme ou le dépressif. Au contraire, elle s’offre des opportunités à ses personnages, tout comme aux spectateurs concernés, qu’il reste toujours une « danse » à partager, au crochet d’une rédemption morale. Les sentiments sont faits pour s’exprimer, qu’importe le rythme, qu’importe la musique, pourvu qu’ils soient sincères.