Le franco-tunisien Mehdi M. Barsaoui n'est pas un inconnu. On a vu "La Belle et la Meute" il n'y a pas si longtemps. Un Fils commence très bien: par un joyeux pique nique entre amis, où on boit à la santé des islamistes. Il n'y en a qu'un, dans la bande, qui pense qu'ils représentent un danger réel... Fares (Sami Bouajila) est chef d'entreprise; Meriem (Najla Ben Abdallah) fête l'obtention d'un poste important dans l'administration. Ils sont beaux, riches et très amoureux, même si on comprend vite que leur couple a dû passer par une zone de turbulence. Ils s'offrent un petit week end touristique, avec leur adorable petit garçon de dix ans, Azziz. Direction Tataouine, la porte du désert -somptueux paysages minéraux. Et là, le drame. Ils ne sont pas les cibles, c'est une voiture officielle qui est visée par les terroristes mais une balle perdue atteint le petit garçon au foie. Foie détruit, seule une greffe peut le sauver. Et vite.
Les analyses sont claires: Azziz ne peut pas être le fils biologique de Fares. Aïe! là, pendant un certain temps, on se demande si on n'est pas tombé dans un téléfilm larmoyant de TF1 ou une version longue d'un épisode de Grey's Anatomy.... Car, il est où le vrai père? Je crois qu'il faut passer outre ce côté un peu longuet, un peu mélo, les hésitations de Meriem, la rage de Fares quand il finit -il faut bien y arriver- par être mis au courant, le suspense: Azziz sera t-il sauvé? ou pas? Il faut plutôt s'intéresser sur ce que le film nous dit de la Tunisie.
Dans ce Sud profond, les infirmières portent le foulard. Les patientes, voilées elles aussi, assises très sagement, regardent ce couple moderne qui brasse beaucoup d'air. Le chirurgien (Noomene Hamda) voudrait, tellement, sauver le petit garçon mais est, en même temps, tellement mal à l'aise face à cette histoire d'adultère qui l'oblige à sortir de sa morale traditionnelle. Face à cet homme qui pense, parce qu'il est riche, qu'il peut tout, par exemple sauter des étapes dans l'accession à la greffe...
Et puis, la législation sur les greffes est très restrictive. Le Coran ne doit pas bien apprécier que des petits morceaux d'homme se baladent d'un corps à un autre. Il faut justifier d'une parenté. Mais si il y a un autre père biologique, pour Meriem coupable d'adultère, c'est direction prison... Et pourtant, la Tunisie et le pays qui a la législation la plus libérale, la plus féministe de tous les pays du proche Orient.
Et enfin, il y a un homme qui rôde autour de l'hôpital, à la recherche de clients. Il a une clinique privée, lui, luxueuse, avec un plateau technique ultra-moderne, et des chirurgiens de première main. Les riches clients, comme Fares, peuvent donc bénéficier de greffes en urgence, compatibilité garantie. La Lybie est toute proche. Il y a plein de morts à utiliser.
Ou bien. C'est là que le film de Barsaoui bascule dans le fantastique gore (on l'espère!!!) Ou bien il y aurait en Lybie des fermes d'enfants, réservoirs d'organes....
Film inégal donc, mais bien intéressant si on s'intéresse à son aspect sociologique au delà de son côté mélo. A voir.