"Edward aux mains d'argent" est, à mes yeux, le plus beau et magnifique conte jamais transposé à l'écran. Les silences s'enchainent dans une éloquence rayonnante. Tim Burton n'a pas crée un chef d’œuvre, mais un film intemporel qui traverse les époques sans ne prendre une ride, en ne manquant pas au passage de transmettre un message universel. Cette fresque lyrique, poétique, nous plonge dans une histoire hors du commun qui, si elle serait peu crédible dans le contexte actuel, nous interpelle à chaque plan. L'immense Burton y met toute son âme, tout son cœur, dévoile ses propres démons et mais ne nous les présente pas comme le feraient d'autres réalisateurs souffreteux. Il incarne cet individu venu d'ailleurs rejeté par une société qui n'admet pas sa différence. C'est toute la base de "Edward aux mains d'argent", mais ce serait limiter l'impact émotionnel que procure le film de le réduire à cette simple analyse. C'est bien davantage encore. Le cinéaste adopte une mise en scène très sobre, mais d'une rare intelligence. Les idées foisonnent et on s'en prend plein les yeux pendant 1h40. La narration est exemplaire, le scénario infaillible, les dialogues incisifs. Bref, c'est la perfection dans toutes ses formes. Mention spéciale pour les plans subjectifs sur les ciseaux qui constituent alors un personnage à part entière, indissociable de Edward. Parlons-en d'ailleurs. Johnny Depp, jeune comédien destiné à l'avenir radieux qu'on lui connait, crève l'écran. En fait non, il le fracasse. Sa performance est d'une justesse impressionnante : tantôt tiraillé, tantôt songeur, en en oubliant pas ces moments de folie et d'humour, Edward est un solitaire qui tente de gagner l'affection d'un entourage qui ne comprend pas ses intentions mais cherche seulement à exploiter ses différences. Ce qui choque et bouleverse, c'est la manière dont on est touché et meurtri par cette histoire alors que toute l’œuvre est colorée. Quant à Winona Ryder. Je ne sais pas trop quoi dire si ce n'est qu'à chaque fois que je vois ce film et que je l'observe, j'en tombe désespérément amoureux. Elle est gracieuse, mystérieuse et envahit l'esprit par l’intermédiaire de mots simples mais tellement forts. "Hug me" dit-elle. "I can't", dit-il. Et les larmes effondrent une à une sur la télécommande de notre lecteur qu'on ne peut se résoudre à garder en mains, trop émus par le tableau auquel on assiste. On sait ce qui va arriver, on sait ce qu'il en sera mais, malgré tout, on regarde une énième fois cette romance éclore et se briser en espérant, à chaque fois, que cela se finisse autrement. Ce duo d'acteurs est sans conteste l'un des plus beaux que l'on ait vu à ce jour à l'écran. Mais si "Edward aux mains d'argent" est ce qu'il est, c'est aussi en partie grâce au virtuose Danny Elfman. C'est simple, pour moi, aucune bande originale n'égalera jamais le travail du compositeur sur cette œuvre. Chaque note exprime exactement chaque intention du cinéaste, si bien que leur collaboration en devient divine. On sourie, on pleure, on s’inquiète, on se questionne. Tout ça dans un film qui n'avait, pour départ, pour ambition, que de raconter une histoire. Mais la magie opère. La danse sous la neige, magnifiée par le metteur en scène, résume à elle-seule tous les enjeux autour du film. La photographie est superbe, les décors fabuleux. On pourrait en parler des heures et des heures, mais quoi dire, finalement? "Edward aux mains d'argent" est, en d'autres termes, le film qui me touche le plus profondément et titille mon cœur sans aucun artifice. Il me subjugue et me hante. Il me fait fantasmer et me torture. C'est un mythe, un culte, une merveille du septième art.