Ouah… Et moi qui m’attendais à un Bergman mineur ! L’Heure du loup est un film vraiment étonnant et, qui plus est, d’une grande puissance. Une plongée cauchemardesque dans l’inconscient qui ronge l’artiste, un inconscient mêlant fantasmes et tourments.
J’aborderais d’abord l’exceptionnel travail sur l’image qui a été titanesque. La photographie du film est juste magnifique, l’Heure du loup présente sûrement l’un des plus beaux Noir & Blanc de l’histoire du Cinéma, Nykvist a fait un boulot du tonnerre pour sublimer déjà l’excellente mise en scène d’un Bergman des grands jours. Certains plans sont tout bonnement magnifiques et le mot est faible ! (La séquence sur la falaise, le couple enlacé au milieu du linge…)
De plus le film n’est pas avare en passages marquants avec cette intro et ce monologue de Liv Ullman, la scène avec l’enfant, les séquences dans le château… Certaines scènes sont vraiment d’une puissance suggestive effarante, on sent encore chez Bergman cette influence tout droit sortie du cinéma muet avec ces séquences sans dialogues, avec seulement l’action sous nos yeux.
Le film offre également une structure narrative assez originale, le film semble s’éloigner de toute structure banale pour offrir un montage final pour le moins épatant. Bergman nous perd entre réalité et rêve de par son scenario mais aussi grâce à son excellent travail de réalisation, pour moi ce film est l’illustration-même que Bergman était un des plus grands cinéastes au monde, un grand artiste.
Quand on regarde l’Heure du loup, il est impossible de ne pas penser à ce chef d’œuvre qu’est Huit et Demi de Federico Fellini. Les deux œuvres abordent les doutes de l’artiste face aux nombreux tourments qui l’habitent même si le Fellini souligne davantage une pression extérieure qui appuie les délires de son personnage principal tandis qu’ici on parle plutôt d’une douleur interne. On pense également à Persona, sorti quelques années avant, qui semble être le contraire de l’Heure du loup, ce dernier contant plus une rupture tandis que Persona expose une fusion. Le scenario du film est d’un génie fou tant il nous perd habilement et ça, Bergman le fait avec une facilité déconcertante ! Nous sommes sans cesse perdus, j’ai cru ressentir les mêmes tourments que le personnage interprété par Max Von Sydow qui, au passage, prouve une nouvelle fois qu’il est un grand grand acteur. Une performance époustouflante à laquelle s’ajoute celle de la non moins géniale Liv Ullman. En fin de compte, l’Heure du Loup est une œuvre d’une beauté saisissante qui sublime cette atmosphère glaciale et cauchemardesque. Une œuvre majeure de Bergman, l’un de ses meilleurs films à mes yeux du moins, un véritable chef d’œuvre !