Avec son synopsis particulièrement original et son casting tout aussi intéressant (Matt Damon en ouvrier d'Amérique profonde peu ouvert sur le monde, Camille Cottin en mère un peu perdue mais toujours optimiste et Abigail Breslin en jeune fille endurcie par la prison), Stillwater est le genre de film qui fait furieusement de l’œil !
Et le résultat est à la hauteur des attentes :
Inspiré de l'histoire d'Amanda Knox, le scénario est plutôt prenant et intéressant. On accroche bien aux personnages, qui sont bien écrits, et le suspense nous accompagne tout au long du film, sans que le film ne devienne pour autant un fiévreux thriller. On est plutôt sur une enquête type "polar nordique", agrémentée de nombreuses scènes plus centrées sur la relation qu'entretiennent Bill et Virginie (Matt Damon et Camille Cottin).
Les amateurs de scènes d'action à la chaîne et de films policiers pourront ne pas trouver leur compte, mais j'ai pour ma part beaucoup apprécié cet aspect du film : il prend son temps, ne se presse pas, et laisse aux personnages le temps de s'étoffer.
Matt Damon campe très bien l'américain un peu "brut de fonderie", qui va découvrir un autre monde, une autre culture, et surtout qui va s'ouvrir au fil du film aux autres personnages, et donc au spectateur. Camille Cottin est aussi très bonne en comédienne insouciante, qui prend la vie comme elle vient ("à la marseillaise", serais-je tenté de dire), et qui se donne à fond pour les autres.
Les autres personnages, notamment la fille de Bill, ainsi que la fille de Virginie sont aussi très bons, j'ai notamment été très agréablement surpris par la prestation de Lilou Siauvaud, qui tient bien son rôle malgré ses 10 ans seulement.
Le duo marche bien, l'antagonisme entre l'américain plutôt "traditionnel" et ce "je m'en foutisme" à la marseillaise est très bien exploité par le réalisateur. Bill Baker navigue dans un milieu qui lui est totalement inconnu, et va évoluer progressivement pour se l'approprier (sans pour autant devenir marseillais, hein !).
Marseille est vraiment bien représentée, notamment par la réalisation qui prend son temps pour laisser apprécier la "vraie" ville (pas uniquement le Vieux Port et le Panier), et on retrouve plutôt bien l'ambiance de la vie là-bas.
Les principaux reproches que j'aurais à faire concernent l'histoire : si elle est intéressante et bien rythmée au début, la fin est un peu "rushée" avec quelques facilités dont on aurait pu se passer, à mon humble avis, et qui m'ont (un peu) sorti de l'histoire, alors que j'étais vraiment très pris dedans jusqu'aux deux-tiers environ.
Un autre défaut, inhérent à la distribution française, vient de la VF, de son existence même : une bonne partie de l'histoire, notamment au début, qui justifie le rapprochement entre les deux personnages principaux, est que Bill Baker est confronté à la barrière de la langue et a besoin d'aide pour communiquer, que ce soit avec les autorités ou avec les autres personnes qu'il sollicite dans son enquête. Hors, la VF casse tout cela, puisque ce sacré Bill parle uniquement français. C'est donc souvent assez perturbant, et on perd une bonne partie de ce que le réalisateur voulait transmettre. Et certaines scènes en deviennent presque loufoques, lorsque deux personnages parlent de Bill, pas forcément très élogieusement, juste devant son nez, et que ce dernier ne réagit pas d'un poil... Malheureusement, la VO n'était pas disponible par chez moi.
Stillwater est donc un bon film, captivant et rafraîchissant, qui prend le temps d'installer, en plus de son intrigue globalement réussie, une histoire d'amitié et d'amour attachante, toute en retenue, et un cadre vraiment travaillé (Marseille devient presque un personnage à part entière du film). Mais... Évitez la VF autant que possible, elle fait perdre beaucoup de saveur au film, notamment au début.