Présenté à tort comme un polar, « O fim do mondo » ou « La fin du monde » est plutôt une plongée dans un monde à part comme l’était « Les misérables » de Ladj Ly , ici une immersion dans une banlieue pauvre de Lisbonne , celle de ces immigrés cap-verdiens que le Portugal n’a pas su intégrer…Spira, à peine dix-huit ans, plutôt taiseux , sort de huit années de maison de correction et revient dans ce bidonville, au Brésil on parlerait de favela, qui lutte contre les bulldozers et les décisions politiques visant à raser progressivement le quartier, pour faire place à de nouveaux immeubles…Certains de ses anciens amis sont en prison, d’autres ont émigré… Ce quartier de Reboleira n’a rien de touristique, pauvreté, ennui, agressivité à fleur de peau, les copains qui n’ont que le deal comme seul horizon. Cela ressemble à la fin d’un monde…c’est un film lent et grave, le plus souvent tourné dans l’obscurité, à l’atmosphère glauque et poisseuse…. L’intrigue (un vieux trafiquant qui s’oppose à Spira) est secondaire : le regard bienveillant, l’analyse sociale, la plongée dans une cité condamnée, priment. Malgré le manque de moyens (on sent le budget étriqué ), il y a là une ardeur, une flamme qui forcent l’admiration. C’est du cinéma d’écorché vif, sensible et chaleureux qui manque un peu d’ossature mais qui permet de découvrir des figures inhabituelles et d’écouter le créole cap-verdien …le film s’ouvre sur un baptême dans une église et se termine par l’enterrement d’un des caïds du quartier, chaque évènement étant prétexte à fêtes et libations…Nous sommes loin du film de gangsters ….le tragique nait des gestes du quotidien, de ses familles décomposées puis recomposées…et suggère un besoin infini de tendresse, comme entre Spira et Iara, jeune fille de son âge et déjà mère…Pour son second long métrage, Basil da Cunha signe un film lent et grave à la sombre beauté plastique…hélas visible uniquement à l'Espace Saint Michel !!