Alors que le cinéma italien concluait la décennie 2010 sur un grand cru deux années de suite, les films italiens se font rares en 2020. Matteo Garrone a opté pour une sortie sur Amazon afin de ne pas essuyer de mauvaise carrière dans les salles vu les critiques très mitigées de son Pinocchio. Pourtant, un petit film nous parvient et il faut s'en réjouir car il s'agit du feel good movie de l'été. Sans prétention et sans pour autant manquer d'ambition, Il Campione (titre original) se révèle une belle surprise. Tout d'abord, il faut saluer le rythme de cette comédie dramatique qui alterne avec justesse scènes d'émotion, scènes descriptives et quasi documentaires et scènes humoristiques. Il n'y a certes pas de prouesse visuelle à proprement parler mais le film assure ses arrières : le montage est très bien construit par exemple. Très doué dès que le rythme s'accélère, ou lors de scènes avec musique en arrière plan, Leonardo D'Agostini sait doser son film. Certes, certaines scènes font penser à des clips (les moments musicaux notamment). Néanmoins, le film n'a pas l'ambition de révolutionner le genre, encore moins le cinéma.
Le film doit beaucoup à son pitch de départ : la rencontre improbable entre un jeune footballeur à succès et un professeur qui doit lui faire passer son BAC entre deux matchs. Cela donne lieu à de vraies scènes cocasses dues à l'incompréhension totale entre les deux protagonistes qui viennent d'un monde relativement différent. Les tentatives du professeur pour faire travailler le jeune sportif durant la première partie du film sont drôles sans non plus provoquer d'éclats de rire. D'Agostini accumule les entraves aux études en peignant assez bien le milieu du football en club professionnel. On assiste donc aux shootings photo, aux interviews, aux réunions manager/agent/footballeur/père... Ces scènes donnent du sel au film et font sourire. Elles montrent à quel point ce milieu peut être déconnecté de la réalité (les photos du jeune sportif en Rome antique et les portables) et en même temps ancré dans le monde moderne (l'étude de la célébrité toxique avec le mariage arrangé, la question des followers). Rien n'est appuyé, tout passe au travers de petits détails, de scènes assez courtes mais qui font mouche.
Ce qui intéresse essentiellement le réalisateur demeure le duo improbable formé par le footballeur et son professeur. D'Agostini casse les clichés pour nouer une belle relation entre deux hommes complexes, avec leurs démons et leurs aspirations. La relation père-fils de substitution n’apparaît qu'au milieu du film mais donne lieu à de belles séquences d'émotion dues en grande partie à la personnalité des deux héros. D'un côté, un jeune homme sportif, crâneur, beau gosse, dragueur qui révèle sa sensibilité et une belle humanité au contact de son professeur (son amour pour son père, celui pour sa copine, et le souvenir de sa mère à travers une fondation) mais aussi toutes ses contradictions touchantes (son père vole son argent mais le jeune homme le garde près de lui par peur de solitude). De l'autre côté, un professeur désabusé, blasé, qui peine à se reconstruire et à trouver un but voire du goût à la vie mais qui, en côtoyant le jeune sportif, retrouve la saveur de la pédagogie quand elle s'adapte à chaque élève. Stefano Accorsi est pour cela très émouvant quand son jeune partenaire Andrea Carpenzano, en plus d'être magnétique, sait vous faire verser quelques larmes.
D'autres critiques de films sur cinedelirious.blogspot.com