On a tout dit ou presque sur "Blanche Neige et les 7 nains", chef-d’œuvre de l’animation qui a révolutionné le genre et a imposé Walt Disney comme un génie visionnaire. Pourtant, plus de 80 ans après sa sortie, le film reste toujours aussi fascinant, et ce à plus d’un titre. Tout d’abord, l’exploit technique reste extraordinaire pour l’époque (la sortie remonte à 1934 !) et, bien que le style ait un peu vieilli aujourd’hui, on sent bien qu’un soin tout particulier a été apporté au dessin et à l’animation. "Blanche Neige et les 7 nains" a, d’ailleurs, bien mieux résisté aux affres du temps que bien des dessins animés Disney sorti des décennies plus tard (voir, par exemple, "Les 101 dalmatiens", "Les Aristochats", "Robin des bois" ou encore "Taram et le chaudron magique") grâce à sa fluidité et son souci du détail. On a, d’ailleurs, plus l’impression d’être devant une œuvre d’art qu’un dessin animé, chaque plan étant pensé comme un tableau. A cette qualité esthétique s’ajoute une qualité musicale, le film baignant dans une atmosphère délicieuse où la musique (superbe) est omniprésente et les chansons sont devenues des classiques rentrées dans la culture populaire ("Siffler en travaillant", "Heigh Ho, Heigh Ho, on rentre du boulot", "Un jour, mon prince viendra"…). En résulte un sentiment bien confortable qui n’est pas sans rappeler les histoires du soir qu’on nous racontait petit avant de dormir. A ce titre, le choix du conte des frères Grimm est d’une formidable pertinence puisque Walt Disney a su en tirer la substantifique moelle pour l’adapter aux thèmes qui lui sont chères et qui deviendront sa marque de fabrique
(une princesse pure, une méchante très méchante qui sera châtiée, des personnages secondaires hauts en couleurs, une voire plusieurs morales à portée pédagogique pour le jeune public, une fin heureuse…).
Disney démontre, également, son incroyable talent pour créer quand il s’agit de créer des personnages marquants au look inoubliable. Blanche-Neige est, ainsi, immédiatement caractérisée par sa robe si particulière et étonne par son absence totale de cynisme. La méchante Reine épate par sa dureté et son jusqu’au-boutisme, notamment lors de son effrayante transformation en vieille sorcière. Quant aux 7 nains, on ne saluera jamais assez l’idée de génie de Disney de les affubler d’un trait de caractère en rapport avec leur nom et d’une tenue différente permettant de les identifier facilement. Cette idée permet de densifier les personnages, de les rendre attachants et, accessoirement, de jouer avec à l’occasion de gags visuels diablement efficaces. J’ai, pour ma part, toujours eu une préférence pour l’hilarant Simplet (qui fait écho aux grandes heures du cinéma muet) et le ronchon Grincheux. Grâce à eux, le film n’est pas seulement, beau, il est également drôle et plein d’énergie. Plus important encore, le film n’a pas peur d’effrayer le jeune public avec des scènes assez frontales
(la fuite dans la forêt, la tentative d’assassinat par le Chasseur, la première apparition de la sorcière…)
, à l’image des contes d’antan même si Disney a l’intelligence de ne jamais faire durer ces scènes ou de les compléter par une séquence plus rassurante. Une mise en scène impressionnante, une belle histoire, des personnages formidables et des chansons gravées à vie… comment ne pas aimer Blanche-Neige et les 7 nains, dont le seul défaut est, sans doute, son ancienneté et, de ce fait, une image qui peut paraître surannée à l’heure de l’animation en 3D ainsi qu’une histoire qui pourra sembler trop primaire à certains (la princesse qui attend son Prince Charmant et finira par partir avec lui sur son cheval blanc vers son château pour vivre heureux et avoir beaucoup d’enfant… pas assez cynique pour un public actuel).Pour ma part, je suis, aujourd’hui, encore, sous le charme de ce superbe dessin animé qui aura lancé, à juste titre, la domination de Disney sur le monde du dessin animé.