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Victor A.
66 abonnés
388 critiques
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4,5
Publiée le 13 décembre 2021
Film totalement maîtrisé par Audrey Diwan qui offre aussi une direction d'acteur parfaite. L'actrice principale y est fascinante de justesse. Un grand film sur un sujet important.
Tiré d’un ouvrage autobiographique de la récemment nobélisée Annie Ernaux, ‘L’événement’ raconte l’histoire d’une étudiante, brillante et issue d’un milieu modeste, qui tombe enceinte dans la France rurale du début des années 60, plusieurs années avant la légalisation de la pilule contraceptive et bien avant la loi Veil. Ce n’est pas le regard de la société qui est traité ici car un tel événement restait tu par crainte du scandale mais le chemin de croix solitaire auquel devait faire face une jeune femme, consciente qu’une grossesse non-désirée allait hypothéquer son avenir : l’entourage amical, même proche, qui préfère se désolidariser de toute décision, l’impossibilité d’expliquer la situation quand elle déborde sur la vie quotidienne, les médecins qui n’osent pas aller contre la loi. En filigrane se dessine un tableau plus général de la condition féminine dans une ère et un lieu pas si lointains aux mœurs pourtant restées très archaïques. Si ‘L’événement’ n’échappe pas aux faiblesses du “film-dossier” francophone, très intéressant mais cinématographiquement pauvre, au moins a-t-il la volonté de ne pas prendre de gants quand il expose toute l’horreur et la souffrance des rares portes de sortie qui existaient voici soixante ans pour traiter les grossesses non-désirées : un rappel salutaire de la chance de vivre dans des pays qui donnent aux femmes le droit absolu à disposer de leurs corps, à l’heure où ce droit est remis en question de plus en plus fréquemment dans des pays où on pensait l’affaire réglée.
Anne studieuse et méthodique étudie pour avoir son destin entre ses mains et pour devenir écrivaine , un jour elle apprend qu'elle est enceinte , elle ne veut pas de cet enfant qui va chambouler tout ses plan, que ferait elle d'un enfant alors que ses études sont là... Nous sommes en 1963 en France, les femmes ne sont pas maître de leur corps. L'avortement est un délit ... que faire ???
France, 1963. Anne, étudiante prometteuse, tombe enceinte. Elle décide d’avorter, prête à tout pour disposer de son corps et de son avenir. Elle s’engage seule dans une course contre la montre, bravant la loi. Les examens approchent, son ventre s’arrondit.
C’est Audrey Diwan qui, pour sa seconde réalisation après Mais vous êtes fous en 2019, adapte le roman d’Annie Ernaux publié en 2000. Elle a écrit le scénario avec Marcia Romano ayant fait celui de Suprêmes et De son vivant sortie la même semaine. L’Événement a obtenu le Lion d’or à la Mostra de Venise 2021.
Ce pourrait être qualifié de sociétalement utile. Quoi qu’il en soit, je l’ai trouvé très bien.
Le film se déroule en 1963 une époque où l’avortement était interdit. L'interruption volontaire de grossesse (IVG) a été légalisé par la loi Veil du 17 janvier 1975. Longtemps mis sous silence, le manifeste des 343 en 1971 puis le procès de Bobigny en 1972, ont tous les deux marqué la présence forte du sujet dans le débat public. On peut d’ailleurs entendre parler de cela dans le film Flashback actuellement sur Amazon Prime Video. Avant, l’avortement était passible d’une peine de prison, voire de mort durant le régime de Vichy.
Cette histoire est donc véritablement prenante par son raisonnement historique. On va être immergé dans les années 60 avec cette étudiante qui ne veut pas devenir une mère de famille enfermée dans son foyer, comme le sont devenus certaines de ses camarades. L’appropriation temporelle est une belle réussite, ce qui est important pour se sentir dedans. Dommage, le film va mettre tout de même un peu de temps à démarrer. Au début, on ne saisit pas forcément tout de suite les enjeux. Il va avoir comme une montée en intensité plus le péril de la situation va se faire ressentir. La condition d’Anne devient cruciale et on voit les dangers qu’elle prend pour avoir la liberté de décider de son avenir.
Pour nous montrer cela, Anamaria Vartolomei est fantastique. Elle porte une force considérable. Révélée dans My Little Princess en 2011, son évolution est belle à voir. Le casting secondaire est aussi plein d’avenir à l’image de Kacey Mottet Klein, Luàna Bajrami, Alice de Lencquesaing et Édouard Sulpice. Bien entendue, il y aussi l’apport de l’expérience avec Sandrine Bonnaire, Pio Marmai et Anna Mouglalis.
La portée de ce film est grande en dénonçant ce qui arrive à Anne avec l’impossibilité d’avorter malgré son choix de ne pas garder cet enfant. Ces années-là semblent tellement loin pour une génération qui a grandi dans un pays où l’avortement est légal, mais il est bien de faire ce genre de pique de rappel. Le réveil des consciences est là pour dire que rien n’est jamais acquis et qu’un retour en arrière pourrait être préjudiciable. La femme ne voulant pas garder son enfant devait risquer sa vie en plus d’être mis au pilori de la société. Cette décision peu évidente était très mal vue, et le risque de prison pour les aidants faisaient que personne ne voulait tendre la main. Le système jugeait des femmes qui n’avaient aucune porte de sortie.
Le premier long-métrage d’Audrey Diwan (« Mais vous êtes fous ») frappait déjà fort. Pour sa deuxième composition, sortie en 2021, la réalisatrice française confirme son talent. Elle réunit une nouvelle fois ses acteurs fétiches (Pio Marmaï et Céline Sallette) tout en leur offrant des seconds rôles, laissant à la jeune actrice Anamaria Vartolomei (César du meilleur espoir féminin) le soin de crever l’écran. Au début des années 1960, période où l’avortement est totalement illégal, une étudiante tombe enceinte. Afin de poursuivre ses études et conserver sa liberté de femme, elle s’engage seule dans une démarche clandestine. Avec une caméra à l’épaule souvent resserrée sur l’héroïne, permettant de mieux suivre son parcours tant mental que médical, on a le droit à quelques scènes particulièrement éprouvantes. Mais ce que le récit parvient le mieux à retranscrire c’est cette volonté de fer pour braver les interdits fixés par la société, dont il faudra attendre la loi sur la légalisation de l’avortement initiée par Simone Veil en 1975. Bref, une œuvre bouleversante qui fait office de travail universel sur l’émancipation de la femme.
Adapter le roman d'Annie Ernaux au cinéma est une riche idée qui permet de donner une expression plus large à ce roman très personnel et très intime. Le film a une évidente vertu pédagogique : il fait ressentir (au lieu d'"expliquer" ce que font déjà de nombreux documentaires) l'enfermement et la solitude des femmes enceintes malgré elles, avant la reconnaissance tardive du droit à l'IVG. Suivre du premier au dernier plan la jeune étudiante, caler la caméra sur son visage, son corps, est un choix de mise-en-scène intelligent car il permet d'incarner ce qui n'est plus pour nous qu'un vieux débat de société. Anamaria Vartolomei donne corps à cette violence patriarcale millénaire avec brio. Mais il n'est pas seulement question du droit à l'avortement dans ce film. Audrey Diwan a tenu à rappeler combien la sexualité des femmes était corsetée il y a soixante ans. L'héritage judéo-chrétien pesait fortement sur les françaises auxquelles la société refusait le droit au plaisir. En plaçant cette question au coeur du film, Audrey Diwa lui donne une couleur très contemporaine, rappelant, sans l'expliciter, que la culpabilisation a été sécularisée et qu'elle pèse encore sur les femmes. Un film juste, intelligent, indispensable.
Un quasi-documentaire sur une époque pas si lointaine et révolue... en France en tout cas : le chemin de croix de l’insupportable solitude de la grossesse non désirée. Avec ses scènes très dures du désarroi et de l’avortement, ce film très cru au douloureux réalisme traduit bien l’excellent récit victimaire et auto-satisfait d’Annie Ernaux. Lion d’or à Venise.
Certains films entrent, comme ça, sans prévenir, par la petite porte et finissent par ressortir à travers la grande. C'est un peu le cas de "L'événement", film choque primé à Venise. Sa réalisatrice nous parle d'une jeune fille, Anne, qui veut avorter dans les années 60, un délit à l'époque, un sujet que l'on veut taire. Ce portrait de la France est plaisant dans un premier temps car la remise en contexte est justement réalisée, puis car la reconstruction est réaliste. Dans un second temps, c'est sans concession que l'on découvre le quotidien d'Anne qui bascule suite à une grossesse imprévue. Dans un temps où seule la mention de l'avortement était taboue, on apprend à connaître un système qui n'autorise pas cet acte, aujourd'hui parfaitement légal et promulgué par Simone Veil en 1975. Le système de santé est du même camp que l'État, c'est à dire qu'il met tout en œuvre pour empêcher la pratique. Anne, jeune fille insouciante et éprise de la vie et des rencontres amoureuses, bascule avec fracas dans ce tourbillon infernal, comprend que vite que son corps ne lui appartient plus et qu'elle est en prise avec les gens qui l'entoure. Quelques résistants croient au miracle, mais c'est presque seule qu'Anne doit se débrouiller. En faisant ce choix, elle apparaît non seulement comme une figure unique défiant l'autorité, mais aussi comme une fille courageuse qui encourage la libération des langues et la nécessité de rendre l'avortement légal. "L'événement" est sanglant, non-académique et toujours filmé sans pudeur ni distance : le personnage subit sa grossesse. Au terme d'un unique plan éprouvant montrant l'avortement - capté par un plan séquence caméra à l'épaule - Anne ressort vide de sa séance bien particulière, possiblement sans son enfant (ce qu'elle espère) mais surtout vide de sens. Cet acharnement n'est-il pas vain, étant donné les risques encourus pour sa propre vie ? Lourd récit d'abnégation et de résistance, "L'événement" est un film que je vous recommande.
le cauchemar d'être une jeune femme dans les années 60 ...On est en apnée pendant tout le film Je suis heureuse d'être née dans les années 70 ! Comme l'a bien dit Marie Sauvion, pour faire immersion, l'actrice qui tient tout le film est souvent filmée de dos...elle a appelé ça "les films de nuque" car effectivement on voit très souvent que la nuque de l'actrice..
Un beau film engagé qui lève le tabou sur l'interdiction d'avorter, qui fut levé il n'y a pas si longtemps que ça. Comme un documentaire. Super actrice. On stresse avec elle en comptant les semaines et en la voyant toujours ne pas réussir à trouver une solution.
Film Super réaliste. De très bons acteurs. Reflet des années 60 et de la vie des femmes à cette époque. Des scènes émouvantes et difficiles. A voir absolument
Un formidable plaidoyer pour l'avortement médicalisé mais qui n'essaie pas de gommer la réalité du geste: il s'agit bien d'une vie que l'on supprime. A l'heure du dérèglement climatique et de la surpopulation, il paraît difficile de revenir en arrière. L'avortement est bien un outil pour limiter l'accroissement de la population mais il est tolérable que s'il est fait précocement et débouche sur la mise en place d'une contraception qui reste sous-utilisée et aussi mal expliquée et mal utilisée.
Ai vu "L'évènement" film mis en scène par Audrey Diwan d'après le roman d'Annie Ernaux qui a obtenu le Lion d'Or au dernier festival de Venise. Tout d'abord ce film est remarquable par sa forme chirurgicale, format 35mm peu usité actuellement, musique minimaliste et percussive, caméra à l'épaule... L'image est étroite tout comme la mentalité du commun des mortels au début des années 60 concernant l'avortement, ce format permet aussi une reconstitution générale sans tomber dans les travers du cinéma français qui se fourvoie généralement dès qu'il s'agit de restituer une époque à tout appesantir à force d'accumulation de bibelots et de costumes vintages trop plombants. La caméra est en mouvement permanent et suit pendant l'intégralité du film au plus près le personnage d'Anne, jeune étudiante en lettres à Angoulème qui cherche absolument à avorter, car elle a tout à fait conscience qu'avoir un enfant c'est renoncer définitivement à des études, à une élévation sociale. "Je suis atteinte d'une maladie qui touche exclusivement les femmes et qui font d'elles des femmes au foyer" dit-elle à un de ses professeurs inquiet de la voir totalement décrocher en cours d'année. La mise en scène d'Audrey Doiwan est très précise et totalement au service de son sujet. Sans jamais tomber dans le pathos ni le voyeurisme, la caméra est franche, froide, explicite mais sensuelle également. La prestation d'Anamaria Vartolmei est en tout point de vue remarquable, l'actrice compose avec justesse une jeune femme de tête qui se bat seule sous les regards scrutateurs de ses camarades féminines et dans les silences remplis de jugement de la gent masculine. La solitude qui entoure Anne au fur et à mesure que s'écoule les semaines qui l'éloignent d'une possible délivrance est pesante et prégnante. Sandrine Bonnaire dans le trop court rôle de la mère est émouvante et Anna Mouglalis, au charisme incroyable dans le rôle de Madame Rivière, nous fait regretter de ne pas la voir plus souvent sur un écran. Le film n'a pas la puissance d'"Une affaire de femme" de Chabrol avec Isabelle Huppert, qui pourrait être son pendant, mais n'en n'est pas moins indispensable.