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soniadidierkmurgia
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4,0
Publiée le 26 octobre 2021
Luigi Zampa a tourné avec l’essentiel des grands acteurs de la comédie italienne mais c’est en compagnie d’Alberto Sordi (sept films en commun), romain comme lui, qu’il trouve celui le plus à même de rendre à l’écran les mille facettes du caractère de l’homme de la rue de l’Après-Guerre alors que l’Italie cherche à se guérir du traumatisme que fut le fascisme. « Il medico della mutua » sorti en 1968 est leur cinquième collaboration. Le réalisateur et son acteur fétiche qui participe au scénario, livrent une satire au vitriol du système de santé italien qui n’est pas loin de ressembler à celui qui est toujours en vigueur en France avec les problèmes de déficits chroniques qui le minent de l’intérieur au point de le vider de sa substance sur bien des aspects. Luigi Zampa qui n’aime rien mieux que dénoncer les travers de la société italienne, n’y va pas par quatre chemins pour tailler en pièce une médecine libérale qui ne voulant pas dire son nom se réfugie hypocritement derrière le système des mutuelles pour se nourrir grassement sur la bête. Les gags sont sans doute parfois un peu lourds mais au moins la démonstration est efficace, montrant comment un jeune médecin, au départ rempli des bonnes intentions du serment d’Hippocrate se laisse assez rapidement gagner par un système qui consubstantiellement pousse à l’abus par le biais de la complicité bienveillante des deux acteurs de la consultation : le médecin qui soigne puis prescrit et le malade qui souvent exige. Alberto Sordi est à son meilleur, offrant sa mine de chien battu très vite réjoui dès qu’un sucre passe sous son museau. A le regarder aujourd’hui alors que les systèmes de santé bâtis sur le mariage baroque entre une activité libérale et un financement basé sur la solidarité font état de leur fragilité, on se dit que tout était écrit dans le film de Luigi Zampa qui n’omet aucun des aspects du problème y compris celui de l’entourage du médecin (ici sa mère et sa femme) qui le pousse à toujours plus d’activité pour maintenir un niveau de vie plus que confortable, très vite addictif. On peut observer, amusé tout autant qu’horrifié, les visites des spécialistes du secteur privé qui proposent de généreux pourcentages sur leurs honoraires si le médecin généraliste pousse les malades anxieux dans leurs bras pour des actes pas toujours justifiés. Tout ceci bien sûr aux frais de la solidarité et pour le plus grand bien supposé des malades. De nos jours où la sophistication des techniques et du discours médical concourt à l’hypocrisie générale, Luigi Zampa aurait certainement des gags à proposer sur le lobbying forcené des laboratoires pharmaceutiques face auquel résister exigerait une éthique chevillée au corps. Une vision sacrément prémonitoire, qui derrière la dérision insufflée par le grand Alberto Sordi, nous rappelle que tous ces grands réalisateurs de la comédie à l’italienne étaient au fond des pessimistes sans illusion.