Il convient de prendre Trepanator pour ce qu’il est, à savoir une parodie assumée de Lovecraft. Ca se révèle dès le nom du personnage principal, non plus Herbert West mais Herbert East ! On évolue dans une parodie de Re-animator, film à succès au tournant des années 80-90 qui a donc inspiré l’inénarrable Moutier national pour son Trepanator. Alors, oui, on est dans un nanar, mais il est clairement conçu comme tel pour faire rire. Conscient de son manque de moyens, Moutier cherche ici à en jouer pour offrir un film réellement hilarant tant tout est fait de bric et de broc. La réalisation est impayable, avec des stock shot hyper visibles, des faux raccords à gogo, des décors totalement irréalistes pour reconstituer les Etats-Unis ou une super clinique (Moutier a tourné dans sa banlieue parisienne !), une photographie cradingue, des accessoires récupérés chez Prisunic et Bricorama… Tout est absurdement fauché, et Moutier en joue pour créer un spectacle aussi grand-guignolesque qu’amusant. Grand-guignolesque en effet car le film est très gore, mais de ce gore caoutchouc-jus de tomate qui fait sourire ! Moutier en fait des caisses dans ce registre, et c’est vrai, c’est pas du tout réaliste (les crânes ne sont visiblement pas humains !), mais on s’en moque, car la générosité est là, et en plus, c’est plein de clin d’œil très marrants (Moutier s’amuse notamment ouvertement de ses squelettes en caoutchouc lors d’une scène).
Côté scénario, le film joue la carte de l’efficacité. Le métrage est court, il est plein de scènes gores, de situations risibles, de dialogues improbables, il est léger, fun et gore. Que demander de plus ? Moutier livre une histoire sans grande surprise, sans grand relief, mais qui remplit clairement le cahier des charges du divertissement sans prétention. Là où trop souvent les films fauchés bourrent de dialogues pour cacher la misère, là où trop souvent ils sortent la carte premier degré et essaye de faire comme les grands en perdant du temps à créer un pseudo-sentimentalisme, Moutier écarte tout ça et se concentre, à propos, sur ce qu’on est venu voir !
Il aurait pu donner à ce sujet une leçon à Jean Rollin, qui a trop souvent cherché à intellectualiser ses métrages fauchés et lorgnant trop vers le navet, puisque le réalisateur apparaît ici ! C’est sympathique de le revoir même s’il ne sait visiblement pas jouer ! De mon point de vue, la bonne surprise du film vient d’un Michel Finas qui joue très premier degré au milieu du foutoir ambiant, ce qui accentue significativement la dimension comique du film ! Clairement, l’essentiel des acteurs est amateur, il ne faudra chercher ni jeu ni personnages construits !
Musicalement, une musique un peu plus peps aurait été bienvenue, car la musique planante et répétitive au synthé trainouille un peu.
Honnêtement, Trepanator est un film fait avec 200 francs et à prendre comme tel. On peut difficilement faire un film magnifique avec ce budget. Du coup, Moutier a eu l’intelligence de faire un métrage comique se jouant de son côté cheap, et le résultat est très divertissant. Bien gore, bien drôle, fendard à souhait, l’essentiel du cahier des charges est rempli pour ma part. 4