Pfiou, quels émotions dans ce film ! François Ozon tape fort une nouvelle fois autour d'un duo de personnage merveilleusement écrit et incarné. Félix Lefebvre et Benjamin Voisin sont éclatants, que ce soit dans leur jeu, leur attitude, leur prestance, presque hypnotisant à l'écran ! Incroyables prestations qui devraient les emmener sans trop de problèmes pour une nomination aux Cesar, surtout Benjamin Voisin qui a vécu une année assez folle et révélatrice pour ne pas dire démontratrice de son talent après 3 films remarqués (La dernière vie de Simon et Un vrai bonhomme) !
Tout au long du film, qui rappelle de temps à autre l'esprit de Call me by your name, c'est une vraie alchimie entre les 2 acteurs qui se dégagent, et qui est en partie appuyé par une écriture ciselée et profonde dans le développement et l'évolution de leur personnage et de leur relation. Le parti pris de tuer le suspense d'entrée de jeu et jouer avec des flashbacks pour s'attarder pleinement sur la psychologie des personnages et leur issue fonctionne parfaitement. J'ai adoré cet aspect d'ailleurs, qui est le coeur de l'intrigue. Ce contraste permanent entre dominant/dominé, manipulation/innocence, et l'ambiguïté des sentiments foulés et refoulés. Tout est admirablement construit par une mise en scène intelligente et une structuration des éléments de narration assez brillante pour accompagner le propos. C'est à dire qu'au-délà de l'écriture et de l'intrigue, amené par les dialogues et la parole, et bien il y a énormément d'éléments qui sont apportés par la gestuelle et le corporel mais aussi par le regard (les jeux de regards et l'intensité de jeu dans les yeux des acteurs étaient quand même incroyable !!). François Ozon l'a de toute façon plusieurs fois démontré dans sa filmographie, notamment dans Jeune & jolie, il sait particulièrement bien filmer les corps à travers le prisme de la jeunesse et de l'innocence. Et le choix de tourner en pellicule qui apporte le grain nécessaire quand il le faut (essentiellement sur les gros plans) couplé au travail du chef opérateur argentin est clairement visible, le cadre et la lumière est soignée, et savent mettre en valeur les 2 protagonistes à chaque instant.
Les actrices secondaires auraient pu être relayée un peu plus qu'au second plan devant une telle prestation du duo principal mais il n'en est rien, elles apportent également leur pierre à l'édifice de cette réussite, et lient parfaitement les nœuds dramatique grâce à leur prestation, je pense surtout aux 2 mères, jouée par Valeria Bruni Tedeschi et Isabelle Nanty, qui apparaissent terriblement efficace pour incarner la fragilité protectrice et émotionnelle de leur relation envers leurs fils.
Sans parler du travail effectué sur les costumes et les décors de Normandie permettant de retrouver une ambiance des années 85 et de reconstruire tout cet univers et esprit de l'époque (petit clin d'oeil à La Boom en passant, on prend !).
Je peux aussi rajouter l'utilisation de la musique qui est superbement maîtrisée, et qui apporte une vraie couleur et émotion au film également, que ce soit par la BO ou même des morceaux de The Cure ou Rod Stewart.
Le seul bémol serait peut-être sur la scène de la découverte
de l'accident mortel de David
qui se fait via la télévision, et qui aurait surement pu être encore plus forte si on l'avait vécu d'une manière plus frontale... car au final cela est amené de façon un peu expéditif, bien que cela fonctionne très bien, mais je pense que ça aurait pu être encore plus fort émotionnellement, ce qui aurait renforcé d'autant plus l'intensité des scènes suivantes
de deuil et de confrontation intérieure d'Alex
.
Mais clairement, je n'ai aucune autre réserve d'arguments négatifs pour ce film, que j'ai trouvé abouti et travaillé de bout en bout et ayant réussi à exploiter tous les enjeux et forces de mis en scène possible.
Assurément un candidat pour le César 2020 !