Avec moi ça n'a pas marché... Pourtant 85, c'est l'époque de ma trentaine, la fin avérée des trente glorieuses mais leur parfum encore dans l'air, les slogans soixante-huitards encore dans les esprits (genre" interdit d'interdire"," jouir sans entraves" et "sous les pavés la plage"), un restant d'insouciance du coup et pas encore de culpabilité chez les consommateurs décomplexés. Tout ça passe dans le film, dont le grain et l'esthétique rappellent cette époque où les moteurs deux-temps, ultra polluants, équipaient encore parfois les motos sans qu'on y trouve à redire, époque encore bénie d'avant le sida, le dérèglement climatique avéré, le continent de plastique, le confinement, la vie masquée et toutes les joyeusetés qui nous attendent peut-être... c'est déjà ça...
Ozon veut nous dire la naissance d'une passion en sens trop unique, nous donner à comprendre la complexité d'une relation, installer une ambiance de drame masquée par l'exultation des corps d'éphèbes, nous préparer aux cendres après la lumière d'un feu de paille. Et avec moi il se plante, je n'y ai pas cru. Car trop de maladresses gâchent l'impact des scènes réussies : une voix off trop présente et peu naturelle, des flash-backs qui apportent peu, un personnage de mère ambigüe souvent limite caricatural,
une scène dans un cimetière qui peine à être crédible malgré le choix d'une belle reprise de Lou Reed, et surtout une autre séquence délirante, à la morgue, pour moi un fiasco final lamentable qui flirte avec le ridicule ( et qui a d'ailleurs provoqué dans la salle un éclat de rire, ce pour quoi elle n'était sûrement pas conçue !)
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Bref, après des cartons aussi réussis que "Grâce à Dieu" et "Frantz", ce "blé en herbe" qui tourne mal m'apparaît comme une contre-performance, malgré la prestation de deux jeunes acteurs investis. Dommage.