Autopsie d’une maternité
La japonaise Naomi Kawase, c’est avant tout la réalisatrice des merveilleux Still the Water et Les délices de Tokyo, sans oublier Vers la Lumière. C’est ce nom-là qui m’a poussé à aller voir ces nouvelles 140 minutes de drame nippon. Satoko et son mari sont liés pour toujours à Hikari, la jeune fille de 14 ans qui a donné naissance à Asato, leur fils adoptif. Aujourd’hui, Asato a 6 ans et la famille vit heureuse à Tokyo. Mais Hikari souhaite reprendre le contact avec la famille, elle va alors provoquer une rencontre… C’est très lent, souvent contemplatif, douloureux et affublé d’un scénario sans doute trop alambiqué. Mais Kawase a un vrai style qu’on ne peut que saluer. Un film difficile et ambitieux.
Ce film est adapté d'un roman à succès au Japon : Le Matin arrive et traite de deux façons d’être mère : être une mère de sang, et être une mère adoptive. La cinéaste a elle-même été élevée par des parents adoptifs et a donc vu dans cette histoire un signe du destin. Comme toujours, chez Kawase, la nature est un personnage à part entière de l’œuvre. A noter que c’est tout de même la 1ère fois qu’elle filme la ville moderne. Elle a aussi voulu parler de ces très jeunes filles qui se retrouvent enceintes puis mères malgré elles. On les sent psychologiquement extrêmement blessées. La cinéaste rappelle que l’adoption n’est pas encore très bien acceptée au Japon. C’est l’amour qui reste au centre de ce drame, pas tant l’amour conjugal que l’amour humain d’ailleurs, celui de vivre avec une autre personne, avec les autres. Reste mon bémol face à tant de beauté d’images et de sentiments, c’est le choix du récit éclaté façon puzzle dans lequel on a parfois du mal à se retrouver. Plus de simplicité n’aurait sans doute pas nui, comme de réduire la durée excessive de 30 bonnes minutes. Mais, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : c’est du cinéma rare.
Les 3 têtes d’affiche du casting sont remarquables de justesse et de sobriété avec Arata Iura, Hiromi Nagasaku et Aju Makita. Ils nous permettent d’accrocher à cette trop longue histoire. C’est ce côté interminable qui nous empêche d’apprécier pleinement la poésie et la grâce du cinéma de Naomi Kawase. Cela devient sans doute trop systématique, comme un cahier des charges auquel il ne faudrait pas déroger. Mais ces « charges » sont si sublimes qu’on reste tout de même sous le charme. Décidément, je suis fan !