Le réalisateur a beau le nier, je pense que personne ne sera surpris si je dis que BAC Nord est un film pro flic. Il prend clairement parti pour les policiers dans le cas de l'affaire de la BAC de Marseille qui a défrayé la chronique il y a une petite dizaine d'années. Et pourquoi pas ? Il dit s'être inspiré des témoignages des policiers eux-mêmes...
J'ai du mal à comprendre pourquoi il n'assume pas ce point de vue...
Surtout que les trois héros du film sont clairement présentés comme des bons gars, où la pire part d'ombre c'est que le personnage de François Civil fume des pétards (on a vu bien pire, surtout que ce n'est jamais montré comme étant un problème). Ils sont par ailleurs systématiquement montrés seuls contre le reste du monde... seuls contre la hiérarchie, seuls contre les caïds de banlieue, seuls contre la justice... Ils ne sont jamais vraiment montrés comme étant en tort, quoi qu'ils fassent... Je veux dire qu'on est très loin d'avoir un film qui soit un temps soit peu nuancé. C'est pas grave de faire un film pro flic, mais faut pas venir faire semblant que ce n'est pas le cas...
Après sur le film en lui-même, c'est assez triste à dire, mais il fait déjà vu... Les personnages sont assez mauvais dans leur écriture (et puis on ne va pas se mentir mais Gilles Lellouche joue assez mal), ils n'ont aucune consistance, c'est même des clichés sur pattes... Entre Leklou qui remplit le rôle du père de famille, Lellouche celui du vieux sage qui a vu la situation se détériorer mais qui a envie de continuer à bien faire son métier, tout en étant assez désabusé vis à vis des directives de sa hiérarchie... et Civil qui est une tête à claques...
Qu'est-ce-qu'on peut faire à partir de là ?
Surtout que les pistes intéressantes sont celles qui sont le moins développées. Au début du film on sent que le trio veut de l'action, ils s'en foutent de retrouver le propriétaire d'un scooter volé qu'ils viennent de récupérer, trop de paperasse, donc c'est chiant... ils préfèrent aller choper des dealers à la place. Plus développé ça aurait été pas inintéressant de voir l'inadéquation entre les profils recrutés pour entrer dans la police et les tâches qu'on leur demande d'exécuter...
Mais non...
Ce qui aurait permis de comprendre pourquoi ils sont parfois assez violents, plutôt que d'asséner un discours simpliste du genre : on veut faire du bon boulot et pas juste du chiffre.
Bref, j'ai l'impression que le réal s'en fout que ses personnages soient des stéréotypes, que le discours de son film soit très simpliste, il avait envie de se faire un petit film d'action durant la première partie. Et je dois dire que si on passe outre le fait que c'est très con, ça passe plutôt bien. On se surprend même à ressentir de la tension durant leur grande opération de police qui a lieu au milieu du film...
Mais alors la fin... On sent que Jimenez n'a aucune idée de comment filmer ça, c'est totalement chiant tant on est sur du déjà vu... le type qui clame son innocence, le type qui ne veut pas trahir son informateur, le type qui devient fou... surtout que ce n'est ni raconté, ni filmé de manière originale, ou avec un angle particulier... ou avec une quelconque audace... Faut juste se taper ce truc là, poussif au possible et surtout toujours aussi con que le reste du film...
Autant avant ça passait car c'était plutôt dynamique, autant là, une fois le rythme ralenti, on voit toute la nullité du truc. Je veux dire qu'il ne prend même pas la peine de traiter véritablement l'affaire de la BAC de Marseille. Il avance des éléments dont il ne fait rien. On apprend que les policiers ont été sur écoute dans leur voiture... ok... ? et ? Qu'est-ce-qu'on apprend dans ces enregistrement ? on ne le saura jamais... parce que nous spectateurs on ne les a rien entendu dire dans la voiture qui serait super compromettant.
Et donc j'ai la sale impression que Jimenez a mis sous le tapis les éléments pouvant incriminer les policiers dans la vraie affaire (qui a l'air d'être un merdier pas possible) et a joué à l'autruche... C'est frustrant. Surtout que moi ça m'intéresse, en tous cas plus que de voir Lellouche jouer (très mal) le mec à bout avec une mise en scène qui récite tous les lieux communs du genre.
BAC Nord est donc un film maladroit, qui s'il s'en sort pas trop mal sur l'action et la tension (c'est déjà pas mal on va me dire), se vautre sur tout le reste. (Le dialogue tout pourri de réconciliation entre Civil et Leklou me hante tellement c'est prévisible et mal écrit)
En fait ça aurait été un meilleur film si jamais ça durait 1h20 et s'il avait eu l'intelligence de refuser de mettre le nez dans l'affaire judiciaire en cours, puisque de toutes façons il n'a rien de bien intéressant à dire dessous et ça ramollit le film et qu'il ne sait pas comment le filmer.
Juste un mot sur les terribles accusations d'être un film qui donne envie de voter Le Pen : mouais. Le véritable adversaire des policiers ce n'est pas la banlieue, mais c'est l’État, l’État qui les abandonne, qui abandonne les quartiers, les politiques qui font leur campagne de communication autour de tout ça...
Bon c'est pas forcément très bien amené, très subtil, très bien traité...