Il y a des fois où il faut savoir laisser les personnages de fiction là où ils sont. Quand je dis "personnages de fiction", je veux dire "personnages virtuels". Plus encore que l’adaptation au grand écran des jeux vidéo, représenter en chair et en os un tel personnage peut s’avérer casse-gueule. A plus forte raison quand le dit personnage est emblématique, au point de devenir une vraie icône du jeu vidéo. Lara Croft en faisait rêver plus d’un. Et plus d’une aussi. Parce que Lara Croft est une femme, aventurière de surcroît, traitée en égal par rapport à l’homme : flanquée de ses armes placardées sur chacune de ses cuisses, elle a de la ressource, aussi bien dans les fusillades qu’au combat rapproché. Et puis les concepteurs avaient poussé le vice jusqu’à la doter d’une poitrine opulente, attribut synonyme de féminité et de gros poumons, ces derniers la rendant pour ainsi dire inépuisable lors de ses multiples courses tout en flattant l’œil des joueurs masculins… quand ceux-ci n’étaient pas en possession du code secret pour profiter en toute impunité de la plastique magnifiquement sculptée de leur héroïne… Pour autant que je m’en souvienne (bien que n’ayant jamais joué à ce genre de jeu et me fiant de ce que j’en avais vu par alors chez les uns ou les autres de mes potes), tout cela est à peu près bien respecté à la différence près que dans cette adaptation, cela ressemble plus à une mauvaise aventure à la Indiana Jones à la sauce féminine, avec une bonne petite touche de James Bond. A l’inverse du jeu vidéo où tous les scenarii étaient possibles, l’histoire manque ici de liant. Les déductions paraissent faciles et un peu tirées par les cheveux. En effet, comment comprendre aussi rapidement que la pendule trouvée n’est rien d’autre qu’une enveloppe ? Le fait est que Lara Croft a toujours la bonne déduction, jusque dans l'emplacement de la clé. Le spectateur n’est en aucun cas impliqué dans le déroulement de l’histoire. Du coup, c’est sans réel intérêt qu’il regarde l’histoire avancer. Si encore le problème ne se limitait qu’à ça… Le premier bémol vient des premières cabrioles d’Angelina Jolie, peu convaincantes dans leur pauvre vitesse d’exécution. Vive la technologie qui permet d’effacer de l’écran les filins, mais dont on ressent que trop bien la présence ! On doit reconnaître cependant une certaine originalité dans les combats. Je veux bien entendu parler de celle qui se passe dans le grand hall de sa maison, mais il est dommage qu’elle soit si mal exécutée, quoique il y a pire sur d’autres scènes d’action. Même si l’actrice correspond bien aux traits de l’héroïne (jusqu’au bout des seins pointus turlututu !), il règne tout de même une attitude perpétuelle assez étonnante : cette sorte d'insouciance permanente quelle que soit la situation, la même que nous marquons lorsque nous allons acheter le pain. Et la relation entre elle et papa Croft ? Avez-vous senti une quelconque fibre paternelle chez lui ? Comme l’a fait remarquer l’internaute cinéphile Le Concorde, non hein… A croire qu’il n’attendait qu’une chose : que sa fille reprenne ses travaux. C’est quand même étonnant quand on sait que Jon Voight est le père d’Angeliina Jolie. Même pas un brin de fierté ! La seule chose qu’on sent est la déception de ne pas avoir pu aller au bout de sa quête. En dehors de ça, les seconds rôles ne sont pas suffisamment exploités. Si Iain Glen remplit son contrat de façon convenable dans la peau de Powell, le personnage incarné par Daniel Craig est clairement sous développé. Il en va de même du petit génie Bryce (Noah Taylor), pourtant incapable de détecter ce qui était caché dans la pendule ; ou du majordome Hillary (Chris Barrie) qui, lui au moins, amène un peu de fun. Ensuite je terminerai par les effets visuels.Comme je le disais à propos des combats, ils sont mauvais ; avec un point d’orgue dans la mocheté atteint lors de l’ouverture d’un passage provoqué par le tintement d’une cloche, implantée au beau milieu d’une zone glacée dans laquelle il ne fait pas si froid que ça puisque… aucune buée ne sort de la bouche des protagonistes, ceux-ci étant arrivés sur les lieux sans aucune difficulté en traversant toute une zone comparable à un glacier avec des véhicules certes lourds mais équipés de pneus étrangement lisses sans qu’ils soient cloutés ou chaînés, des véhicules ayant avalé avec une facilité déconcertante les difficultés que sont les creux et les bosses ainsi que les petites crevasses. Je veux bien que la base (c’est-à-dire le jeu vidéo) permette bien des facilités sur le plan scénaristique, mais là ça fait quand même beaucoup. Comme quoi, il ne suffit de posséder un budget honorable (80 millions de dollars) pour faire un bon blockbuster. Encore faut-il que le réalisateur soit bon et que le scénario soit bien écrit, ce qui n’est absolument pas le cas. Tout juste admissible aux séries B, et encore… Il y a des séries B bien meilleures que ça.